La Défense des inculpé·es du 8/12 alertent sur les glissements dangereux de l’antiterrorisme

Le 8 mars 2021, l’agent 1273SI rédige un Procès-Verbal de « recherches en sources ouvertes » depuis les locaux de la DGSI à Levallois-Perret. La recherche porte sur un numéro retrouvé dans le téléphone d’une personne arrêtée 2 mois après le 8 décembre 2020 puis relachée sans suites après deux jours de GAV. C’est un numéro de la LegalTeam de Paris.

L’agent va ensuite s’orienter vers un article de conseils juridiques pour les lycéen·nes qui souhaitent bloquer leurs établissements dans le cadre de mouvements sociaux dans lequel apparait la liste des avocat·es de la LT de Paris. L’agent constate par « corrélation » que certains des ces avocat·es ont été choisis par certains mis en examen.

Il constate également qu’une personne, elle aussi arrêtée, placée en GAV mais libérée sans suite, a utilisé ce numéro à 4 reprises.

L’agent va faire des recherches sur d’autres LegalTeam pour vérifier si les autres avocat·es en font partie. Il trouve le nom de l’une d’elle dans un document de la LT de Rouen « Arrestations – garde à vue 6 points essentiels ».

On ne comprend absolument pas ce que fait ce PV de renseignement dans ce dossier, cela n’ayant rien à voir avec les faits reprochés. Me BOUILLON fera remarquer au Tribunal qu’aucune recherche n’a été effectuée sur l’Airsoft, alors que c’est un point sur lequel reposent des soupçons, par contre la DGSI et le PNAT ont cru pertinent d’ajouter ces informations sur le choix des avocat·es.

Comment ne pas y voir une volonté de criminaliser l’activité militante de ces avocat·es, afin de saper leur Défense et d’élargir à ces dernier·ères le spectre de la présomption de culpabilité au delà des mis·es en examen, comme cela a été fait pour leurs proches ?

Le PNAT reviendra dessus dans son réquisitoire sur ce qu’il nomme « l’opposition concertée à la manifestation de la vérité« . Manifestement, il est insupportable pour ces magistrats radicalisés que des personnes puissent s’exprimer librement, surtout quand elles démentent les fantasmes avérés de la DGSI.

Au cours des audiences, le PNAT demandera plusieurs fois aux mis·es en examen : « avez-vous l’habitude de prévenir vos avocat·es avant de comettre un délit ?« . Les preuves s’estompant à mesure que le procès avance, le PNAT pointe désormais le soupçon du mensonge pour faire tenir le scénario initial de la DGSI.

Il est difficile de ne pas voir dans le jeu du PNAT la lente chute vers la légitimation de formes de tortures blanches.

En effet, alors que les propos obtenus en GAV dans les geôles de la DGSI sont contestés par les prévenu·es: avec des preuves d’écriture de faux par les agents, mais aussi de pressions psychologiques intenses, des « off » nauséabons, des mensonges pervers, des menaces (15 années de prison), des analyses de personnalité (basées sur plusieurs mois d’écoutes), des menaces d’agression sexuelle et des administrations de Tramadol et d’Antarax ; le PNAT s’évertue à s’appuyer sur ces propos et à instiller la présomption de mensonge sur les déclarations faites devant le Tribunal, en concertation avec les avocat·es. C’est un glissement dangereux et grave.

On a pu voir comment des élus d’extrême-droite assimilent les avocat·es en antiterrorisme aux « terroristes » qu’ils défendent. On a pu voir à Bure le Parquet tenter d’inclure un avocat dans l’association de malfaiteurs. On voit dans des pays où l’antiterrorisme s’est sur- développé que les avocat·es sont toujours les prochain·es sur la liste, à l’instar des journalistes, des artistes, des activistes, syndicalistes, etc. La Turquie et la Russie en sont des exemples effrayants.

Nous dénonçons l’extension dangereuse de la présomption de culpabilité et la lente extension du non-droit planifiée par le PNAT. L’antiterrorisme est l’avant-garde de la deshumanisation.

Soutien812bzh.

Le Syndicat des Avocats de France dénonce : « Au-delà de la grossièreté d’un tel sous-entendu, il est surtout incroyablement dangereux et alarmant dans ce qu’il révèle de la conception des droits de la défense de la part du Ministère Public, et donc du ministre de la Justice, pourtant ancien avocat, et de la DGSI.« 

Le Conseil National des Barreaux dénonce : « l’existence même d’un tel procès-verbal ayant conduit à commenter ou même à simplement rapporter les modalités du choix d’un avocat qui, par les sous-entendus qu’il induit, laisse entendre que ce choix serait considéré comme un indice de la commission d’une infraction ; et la violation par le Ministère public du principe d’impartialité auquel il est tenu en vertu de l’article 31 du code de procédure pénale.« 

La Défense des inculpé·es du 8 décembre dénonce : « la façon dont la police et le parquet se sentent pousser des ailes, dès qu’il s’agit de terrorisme, quitte à oublier quelques principes de base.« 

L’Association des Avocats Pénalistes dénonce : « toute forme de pression mise en oeuvre la Défense et l’exercice de ses droits.«