Dissolution et antiterrorisme : soutien à la Défense Collective

Soutien à la Défense Collective de Rennes

Les comités bretons de soutien aux inculpé·es du 8/12 expriment leur solidarité avec la Défense Collective de Rennes contre la procédure de dissolution administrative décrétée par Macron, Attal et Darmanin. Une dissolution issue d’un travail réalisé main dans la main avec les Renseignements Territoriaux, la Préfecture et les équipes de tord-la-loi du gouvernement.

Depuis plusieurs mois, la préfecture multipliait les attaques médiatiques contre le mouvement radical rennais, les qualifiant dans les médias de « terroristes ». A l’heure où le recours à la torture contre des terroristes (présumés) est valorisé sur C8 et où l’antiterrorisme russe est glorifié (de nombreux compagnons anarchistes, antifascistes et antimilitaristes en font les frais) ; l’emploi de ce terme n’est ni anodin, ni un simple abus, c’est une incitation délibérée à la haine et une provocation à la violence envers les camarades du mouvement social.

Le recours à la torture blanche contre Libre Flot nous a tristement offert un regard lucide sur la fascisation de la répression par la biais de l’antiterrorisme. Nous n’oublions pas non plus comment les unités spéciales antiterroristes ont été déployées pour réprimer dans le sang la colère des jeunes suite à l’assassinat de Nahel.

Après l’arrestation d’un·e amie rennaise par la DGSI le 8 décembre 2020, c’est une nouvelle attaque directe de la Macronie qui vient cibler les milieux radicaux rennais. Cette nouvelle attaque nous touche particulièrement car les propos alcoolisés utilisés pour faire condamner les inculpé•es du 8/12 résonnent fortement avec les commentaires non-modérés utilisés pour justifier la dissolution de la Défense Collective.

Nous partageons la même rage et envie de ne pas nous laisser faire face aux puissants de ce monde, et ce sont aussi les même intentions révolutionnaires contre le capitalisme et l’État qui sont ici criminalisées.

De Bure à Lafarge, des inculpé·es du 8 décembre à l’affaire du 15 juin, de Boris à Serge, de la Palestine au Rojava, de la Grèce à l’Allemagne,

Solidarité antifasciste et internationaliste !

Historique rapide de la dissolution administrative.

La dissolution administrative est une mesure de police administrative. Elle fut promulguée le 10 janvier 1936 par une gauche vacillante face à la menace d’un coup de force fasciste comme celui du 6 février 1934. C’est une loi par définition autoritaire et exceptionnelle, de « sûreté de l’État » qui donne au président de la République la possibilité de dissoudre des « associations provoquant des manifestations armées dans la rue, ou ayant pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire, ou d’attenter par la force à la forme républicaine du gouvernement ». Principalement pensée pour défaire les ligues royalistes et fascistes qui prenaient de l’ampleur (Camelots du Roi, Croix de Feu, Parti National Breton).

De décennie en décennie, et à mesure que l’usage de cette loi se répand, l’étendue des motifs justifiant la dissolution va s’élargir bien au-delà des « groupes de combat » et une présence armée dans les rues. Cette arme républicaine sera rapidement utilisée contre des organisations indépendantistes anticoloniales (Étoile Nord-Africaine en 1937, Parti du Peuple Africain en 1939, etc.), puis très vite sur des organisations de gauche révolutionnaire.

En juillet 1941, le régime de Vichy abroge la loi initiale et opère une première extension légale (qui ressemble fortement à la définition actuelle) ciblant les associations ou groupements « dont les agissements se seront révélés contraires à l’intérêt général du pays ».

Puis, elle sera remise en place à la sortie de la seconde guerre mondiale, connaissant là encore des élargissements à l’« entrave au rétablissement de la légalité républicaine » puis aux « faits de collaboration ». Elle servira donc dans un premier temps à empêcher l’organisation d’anciens collabos, mais elle va aussi être utilisée tout au long du 20e siècle contre des mouvements indépendantistes et décoloniaux : Délégation générale des Indochinois (juin 1945), Parti national malgache (mai 1947), Union des Vietnamiens de France (septembre 1950), Union des populations du Cameroun (juillet 1955), Parti communiste algérien (septembre 1955), Front commun antillo-guyanais (juillet 1961), Mouvement populaire de la Côte française des Somalis (juillet 1967), Alliance révolutionnaire caraïbe (mai 1984), Mouvement corse pour l’autodétermination (janvier 1987), Iparretarrak (juillet 1987), etc.

Sous De Gaulle, l’ordonnance du 22 décembre 1960 va permettre d’étendre la dissolution aux organisations provoquant à « des manifestations contraires à l’ordre public, lorsque ces manifestations ont été interdites par l’autorité compétente », ainsi que celles manifestant « leur solidarité, soit par des prises de position publique, soit dans l’action » avec des organisations dissoutes. Là encore, même procédé : les groupes officiellement visés par cette extension sont des organisations d’extrême-droite d’un côté (Front de l’Algérie Française, Front National Combattant, Organisation Armée Secrète, etc.) et dans la même séquence des organisations anticolonialistes (Front commun antillo-guyanais, Rassemblement des populations tahitiennes, etc.). Et enfin, 11 organisations ayant pris part au mouvement de Mai 68 seront dissoutes dans un même décret, le 12 juin 1968.

En 1972, la loi du 1er juillet, présentée comme outil de lutte contre le racisme, y ajoute la possibilité de dissoudre des associations « incitant à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ; propageant des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ».

En 1986, la loi du 9 septembre sur le terrorisme rajoute la disposition : « qui se livreraient, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger » qui va servir à attaquer le mouvement kurde en France quelques années plus tard.

Et enfin, la loi du 5 juillet 2006 sur les violences lors des manifestations sportives étend la dissolution aux supporters ultras « Paris 1970 – La Grinta », « Supras Auteuil 91 », « Les Authentiks », « Cosa Nostra Lyon ».

Tous ces règlements finiront par être codifiés dans l’article L-212 du Code de Sécurité Intérieure en 2012. Une dernière modification y a été faite par la loi « séparatisme » du 24 août 2021. Ces derniers ajouts sont en gras.

Sont dissous, par décret en conseil des ministres, toutes les associations ou groupements de fait : 1° Qui provoquent à des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ; 2° Ou qui présentent, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ; 3° Ou dont l’objet ou l’action tend à porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou à attenter par la force à la forme républicaine du Gouvernement ; 4° Ou dont l’activité tend à faire échec aux mesures concernant le rétablissement de la légalité républicaine ; 5° Ou qui ont pour but soit de rassembler des individus ayant fait l’objet de condamnation du chef de collaboration avec l’ennemi, soit d’exalter cette collaboration ; 6° Ou qui, soit provoquent ou contribuent par leurs agissements à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ; 7° Ou qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger. Le maintien ou la reconstitution d’une association ou d’un groupement dissous en application du présent article, ou l’organisation de ce maintien ou de cette reconstitution, ainsi que l’organisation d’un groupe de combat sont réprimées dans les conditions prévues par la section 4 du chapitre Ier du titre III du livre IV du code pénal.

Au vu des usages passés et de son élargissement inouï ; de telles extensions des motifs de dissolution administrative sont à même de ciblerdes pans entiers du mouvement socialet à criminaliser toutes critiquesradicales de l’ordre dominant et ses sbires institutionnels.

Comme toute mesure de police administrative, il s’agit d’un geste autoritaire et quasi libéré d’encadrement judiciaire. Cependant, même si elle a des conséquences nuisibles sur les communautés qu’elle vise, notamment par la menace judiciaire de « reconstitution de ligue dissoute » qu’elle fait planer sur les membres supposé·es (3 ans de prison), elle n’a jamais suffit à elle seule à endiguer les mouvements qu’elle ciblait. La dissolution administrative est toujours un élément complémentaire d’une distribution plus large de la violence étatique.

Le rôle de l’antiterrorisme et du renseignement dans les dissolutions

« Notre main ne tremble pas quand il s’agit de défendre la République face à ceux qui croient pouvoir la faire plier. »

– Gabriel Attal à propos de la dissolution de la Ligue de Défense des Noirs Africains (2021) –

Les cas de dissolutions administratives en lien avec des opérations répressives de grande ampleur (et des intérêts géopolitiques) sont nombreux, les exemples les plus sanglants concernent les luttes anticoloniales (Madagascar, Kanaky, Algérie, etc.). Contrairement à ce qui est régulièrement dit, l’usage de cet outil « d’exception » en complément des massacres coloniaux n’est pas un dévoiement d’une loi à d’autres fins – les colonies ayant été historiquement le lieu par excellence de l’exception et de l’expérimentation répressive. La loi de 1936 sur la dissolution des milices de combat a simplement suivi le même processus de militarisation de l’ordre étatique, à l’instar des armes de la police, des techniques contre-insurrectionnelles, et de l’arsenal antiterroriste.

L’antiterrorisme et le renseignement ne sont donc jamais loin des procédures de dissolutions. Ces dernières ont accompagné la répression militaire des mouvements de lutte contre le colonialisme français (organisations indépendantistes algériennes, malgaches, bretonnes, corses, basques, antillaises, kurdes, vietnamiennes, camerounaises), servant de complément à l’action contre-subversive.

Depuis 2015, le gouvernement a fait dissoudre une trentaine d’organisations avec plus ou moins de facilité. Pour certaines, la dissolution s’est effectuée sur des bases de rapports du renseignement, voir parfois uniquement de notes blanches affirmant des « liens avec les milieux djihadistes ». La loi séparatisme et la production rapide de jurisprudences via les recours au Conseil d’État ont élargi drastiquement les possibilités de dissolutions. Cette loi du 10 janvier 1936, pensée par l’État comme une arme d’ultime recours face au péril fasciste, nous enseigne que le combat antifasciste ne peut se mener avec les armes de l’État car elles se retournent toujours contre le mouvement social. C’est le cas pour les outils répressifs en général comme l’a très bien montré l’historienne Vanessa Codaccionni.

Le rendu du Conseil d’État sur la non-dissolution des Soulèvements de la Terre a été médiatisé à tord comme une victoire, alors qu’il confirmait un approfondissement répressif via la dissolution de la Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI) et la GALE. Le décret de dissolution de la Défense Collective de Rennes publié ce 3 avril 2024 utilise abondamment l’argument qui a justifié la dissolution du CRI : la non-modération de propos sur les réseaux sociaux. Argument lui-même issu de la dissolution définitive de Baraka City en 2021. Comme pour la DefCol, plusieurs années de posts sur les réseaux sociaux, soigneusement compilés par le renseignement, venaient appuyer la dissolution de Baraka City. L’élément déterminant qui a fait jurisprudence est la non-modération des commentaires. C’est à dire que l’association (ou le groupement) et son leader présumé, sont tenus pour responsables des commentaires sous leurs publications : « ne pas censurer = promouvoir ».

Dans toutes les critiques qui ont été apportées à cet outil répressif, peu ont souligné le rôle central des services de renseignement et leur place dans la construction d’ennemis intérieurs en lien avec la répression antiterroriste. La dissolution administrative devrait être analysée comme un élément complémentaire de la politique antiterroriste, ciblant particulièrement trois « ennemis intérieurs » triés en trois catégories : « ultragauche » (Lafarge, Affaire du 8/12, Bloc Lorrain, Défense Collective, etc.), « ultradroite » (Alvarium, La Citadelle, Génération Identitaire, Waffencraft, Barjols, etc.), et « islamisme » (CCIF, CRI, Comité Action Palestine, Palestine Vaincra, etc.).

La loi du 11 juillet 1972 sur l’administration va rendre obligatoire l’exposé des motifs de toute décision de police administrative1, renforçant dès lors le pouvoir des rapports du renseignement dans des procédures de dissolution.

Pour qui a été la cible de l’antiterrorisme, comme l’algérien Rabah Meniker, nous savons que les fantasmes peuvent coûter cher, et par quels procédés ces même services de « renseignements » peuvent créer des coupables à partir de petits riens. Comme nous l’expliquions déjà dans un autre texte, « la surveillance est utilisée en antiterrorisme comme un outil de déformation de la réalité. Elle permet à l’accusation de disposer d’une quantité phénoménale d’informations dans lesquelles elle n’a plus qu’à piocher les quelques éléments qui, une fois décontextualisés, serviront à matérialiser la fiction policière. Le reste étant soigneusement ignoré, la surveillance ne vise en aucun cas à rendre compte d’une quelconque réalité mais à augmenter la probabilité de rendre vraisemblable un scénario pré-établi. »

Il y a également des dissolutions qui passent inaperçues, dont les procédés sont pourtant identiques, comme celle de la maison d’édition Nawa en septembre 2021. Cette dernière était accusée (par les renseignements via la bouche immonde de Darmanin) d’être un organe de propagande islamiste. En réponse, Nawa dénonçait « des petites accusations, de types personnels, nourries de rapprochements fallacieux, inexacts, mensongers et surtout, absolument indignes d’un État de droit disposant de services de renseignements capables de mener des enquêtes précises et motivées. Au-delà d’accusations issues de fameuses “notes blanches” qui falsifient, tronquent et résument, à la guise de l’accusation, certains prétendus propos ».

Même procédés également pour La Voie Droite, plateforme en ligne qui diffuse des centaines contenus religieux depuis 2012 et prend « le risque de clamer publiquement [son] opposition à la tendance pro-terroriste] ». Le dimanche 23 janvier 2022, après un documentaire M6 sur « l’islam radical », Darmanin annoncait leur dissolution. Leur communiqué de défense répliquait qu’ « interpréter des passages tronqués et pris hors-contexte aboutit souvent à des conclusions erronées ».

Novembre 1993 : dissolutions et rafle antiterroristecontre les kurdes

En novembre 1993, le sinistre Charles Pasqua lançait une énorme opération antiterroriste visant la communauté kurde militante. La police procéda à une « vaste opération d’interpellations d’environ 200 personnes dans toute la France ». Quelques jours après, le Conseil des Ministres ordonna la dissolution par décret de deux associations kurdes comprenant des centaines de membres.

Stéphane Maugendre, alors avocat d’un des accusé.es déclarait : « Deux semaines après la rafle touchant les membres présumés en France du Parti des travailleurs du Kurdistan, ce mardi, Charles Pasqua a voulu à sa manière boucler le dossier policier de l’affaire. A sa demande, le Conseil des ministres d’hier matin a dissous par décret deux importantes associations présentées par le ministre de l’ Intérieur comme « des façades légales du PKK qui, en France comme dans d’autres pays d’Europe, se livre à des actions de caractère terroriste ou délictuel ». Il s’agit du Comité du Kurdistan et de la Fédération des associations culturelles et des travailleurs patriotes du Kurdistan en France, Yekkom-Kurdistan, ainsi que de sept comités appartenant à cette dernière, qui rentreraient sous les coups de la loi de janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées. »

Dès le lendemain le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) écrivait dans un communiqué :

«Sous prétexte de « chasse aux terroristes », la police française, procédait sur ordre du ministre de l’Intérieur et avec approbation du gouvernement turc, à une rafle parmi les réfugiés kurdes, simultanément, dans plusieurs villes de France: arrestations arbitraires d’une centaine de personnes, perquisitions, locaux associatifs saccagés. »

Même si cette opération débouchera sur un non-lieu 8 ans après (en 2001), pour les 31 personnes mises en examen (« association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ») et leurs proches, la procédure elle-même aura été une peine pour toute la communauté kurde française. Plusieurs mois de détention provisoire (jusqu’à 6 mois), des années de contrôle judiciaire, de surveillance, de frais de justice, et une mise en danger de mort par la divulgation de documents « secret défense » de la DST fuités dans un journal turc (les noms des interpellé·es furent donnés à la police turque).« A quel prix les Kurdes ont-ils été vendus ? » titrait à l’époque le journal duMRAP, « Contre les 235 millions de dollars que représente la vente des hélicoptères « Puma » si efficaces pour la répression des Kurdes en Turquie ? »

Le président de la Fédération Internationale des Ligues de Droit de l’Homme, dénonçait également:

« Il y a trois semaines, le ministre de la Défense, M. Léotard, a réalisé un fructueux contrat de vente d’armes à Ankara. Dans cette affaire, la France était en concurrence avec d’autres pays. La rafle des Kurdes a été la cerise sur le gâteau. »

Trois jours avant cette opération anti-kurde de 1993, le renseignement préparait le terrain en diffusant sa story confusionniste. Le 15 novembre 1993, la DST (Direction de la Surveillance du Territoire, ancêtre de la DGSI) transmettait à la DGPN (Direction générale de la police nationale) un rapport « faisant état d’informations recueillies sur le PKK qui en utilisant en France un réseau associatif, y commettrait des actions criminelles ou délictuelles ». Le biais anti-immigré de la DST leur faisait même écrire que la recrudescence des actions du PKK en France serait « à relier à l’augmentation de l’immigration turque et kurde, notamment clandestine ou dans le cadre de demandes d’asile plus ou moins fantaisistes ». Fins analystes, l’intensification de la guerre génocidaire menée par l’État turc contre le Kurdistan n’apparaissait pas dans leurs conclusions sur les causes de cet activisme.

Pour appuyer ce sinistre spectacle médiatique antiterroriste, un autre coup (monté) de filet était ordonné simultanément dans « les milieux islamistes ». Pasqua déclarera : « Certaines personnes interpellées s’apprêtaient à commettre des attentats en France » et on finira par apprendre bien plus tard que « les services » avaient créé de fausses preuves.

Génération Identitaire, Argos et la reconstitution de ligue dissoute

« Nous ne laisserons aucun groupe dissous se reconstituer. »
Tweet de Darmanin à propos d’Argos, le 12 mars 2024 –

Ce 12 mars 2024, une douzaine de militants d’extrême-droite, en lien avec le groupe Argos, sont arrêtés et perquisitionnés. On leur reproche la reconstitution illégale de Génération Identitaire (groupement dissous en 2021). D’après le juriste Matta Duvignau, le décret de dissolution était riche de « faits précis et documentés », glanés par le renseignement et permettant de la faire entrer dans la définition d’un groupe de combat2 car elle employait une « une symbolique et une rhétorique martiales » :

« Il suffit de lire les pages du décret prononçant la dissolution de Génération Identitaire pour en constater non seulement sa précision mais aussi sa « richesse » : éléments factuels, précis, datés, circonstanciés, indication de noms de personnes, actualisation, etc. […] Qu’il nous soit permis d’émettre une hypothèse, qui n’est en rien, en vérité, originale : cette association – tout comme celles déjà dissoutes il y a quelques mois – faisait probablement l’objet d’une surveillance très étroite de la part des services de renseignements, plusieurs enquêtes ont été menées, des faits précis et documentés ont été rapportés. » nous dit Matta Duvignau.

On peut raisonnablement penser que le décret de dissolution de Génération Identitaire ayant été solidement construit, il devient alors plus aisé de poursuivre une reconstitution de ligue dissoute. L’autodéfense face au renseignement devient alors essentielle, car les éléments de détail du décret peuvent définir plus ou moins de marges de manœuvre.

Cependant on manque de documentation et d’exemples dans les milieux d’autodéfense juridique sur cette procédure. Il y aurait des exemples à rechercher dans les archives de la Cour de sûreté de l’État dans les années 70 où de nombreuses condamnations on eu lieu suite à la dissolution de la Gauche Prolétarienne et du Parti Communiste Marxiste-Léniniste de France. Les peines distribuées à l’époque (par un tribunal militaire) allaient jusqu’à 2 ans de prison ferme (pour Alain Geismar) et la simple distribution du journal affilié au groupe dissous semblait un élément suffisant pour condamner.

On peut lire dans Le Monde du 18 septembre 1970 que : « La plupart des personnes poursuivies devant la Cour de sûreté de l’État sont inculpées de maintien ou reconstitution de mouvements dissous au terme de la loi du 10 janvier 1936. Elles risquent une peine d’emprisonnement de deux ans : deux groupements sont visés ; d’une part, la Gauche prolétarienne dissoute le 27 mai dernier, et, d’autre part, le Parti communiste marxiste-léniniste de France (P.C.M.L.F.) dissous par un décret du 12 juin 1968. Cinquante-six personnes, sauf erreur, sont inculpées de maintien ou reconstitution de l’ex-Gauche prolétarienne, dont dix-huit sont détenues. Certaines d’entre elles ont été poursuivies pour avoir distribué La Cause du peuple, journal dans lequel s’expriment les idées du mouvement dissous le 27 mai. La plupart sont des étudiants ou de jeunes ouvriers, généralement arrêtés dans la région parisienne, dans le nord, dans l’est, ou dans la région lyonnaise. »

Plus récemment, en 2013, la condamnation de Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac ayant dirigé l’Œuvre française et Jeunesses nationalistes révolutionnaires (dissoutes après le meurtre du camarade antifasciste Clément Méric en 2012) donnent un exemple de peines encourues : six mois de prison avec sursis avaient été requis à l’audience le 4 juin devant le tribunal correctionnel, mais les deux nationalistes ont été condamnés à des jours-amendes – 80 jours-amendes à 50 euros pour le premier et 30 pour le second. En appel, Yvan Benedetti avait écopé de 8 mois de prison avec sursis.

Ainsi l’enjeu principal de la dissolution n’est pas de dissoudre en tant que tel, mais de pouvoir criminaliser le fait même de se ré-organiser par la suite. Là où la dissolution est un acte purement politique (émanant directement du gouvernement), l’inculpation pour « reconstitution de ligue dissoute » permet une judiciarisation prévue par le Code Pénal. LArt. 431-17 prévoit : « Le fait d’organiser le maintien ou la reconstitution, ouverte ou déguisée, d’un groupe de combat dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 ». C’est un délit puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.

Dans le contexte actuel de renouveau de l’usage de la dissolution administrative, la production de jurisprudences est au cœur des stratégies répressives contre le mouvement social. Que ce soit par l’article L. 212 du CSI ou l’article 421 du Code Pénal (association de malfaiteurs terroriste), il n’y a aucune raison de se réjouir des menées répressives du gouvernement même quand elles ciblent nos ennemis. Sa prétendue lutte contre « l’ultradroite » ou « l’islamisme radical », n’est que le faux-nez du basculement fasciste en cours qui vise à établir un nouvel ordre militarisé dans lequel des pans très larges du mouvement social sont menacés.

La reconstitution de ligue dissoute est également un moyen d’étendre les prérogatives de plusieurs services de renseignement, qui répartissent leurs activités selon 7 finalités. Les Renseignements Territoriaux, les Renseignements de la Préfecture de Police de Paris, le Renseignement Pénitentiaire, et la Sous-Direction de l’Anticipation Opérationnelle, sont habilités à violer la vie privée des personnes dans le cadre de la finalité 5 : « La prévention de : a) des atteintes à la forme républicaine des institutions ; b) des actions tendant au maintien ou à la reconstitution de ligue dissoute ; c) des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique. »

Ces même services sont ceux qui luttent activement contre le mouvement social et récupèrent des renseignements en vue des dissolutions. Lorsqu’un décret tombe, ils bénéficient dès lors d’un débridage légal qui leur permet de déployer plus de techniques de renseignement.

Il n’y a donc aucune raison de se réjouir de l’opération actuelle menée contre Argos pour « reconstitution de ligue dissoute ». Qui qu’il touche, l’outil répressif reste le même, et toujours dans les même mains : l’État. On a pu voir avec le procès du 8/12 comment une jurisprudence contre un attentat djihadiste pouvait être utilisée quelques années plus tard contre un militant ayant combattu Daesh et n’ayant projeté aucun attentat. Il en sera de même pour Argos.

Dissolutions administratives : nouvelles séquences post-2015

La dissolutionnite aiguë que nous connaissons aujourd’hui a été lancée le 14 janvier 2016 (un an après les attentats) avec la dissolution de trois associations musulmanes liées à la mosquée de Lagny, présentée par Bernard Cazeneuve comme un « foyer d’idéologie radicale ». Cette première vague de dissolution est une réaction directe aux attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher de janvier 2015 et elle intervient dans le prolongement d’opérations antiterroristes ciblant la mosquée, mais plus généralement ayant ciblé plus de 5000 familles musulmanes via des « visites domiciliaires » (descentes d’unités de police militarisées).

– Jusqu’en 2019, les décrets de dissolution visent principalement des organisations musulmanes, elles sont toutes ciblées sur la base des articles 6 et 7 (terrorisme).

Article 6 (1972) : « qui, soit provoquent à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propagent des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence ».

Article 7 (1986) : « qui se livrent, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger »

– Le 24 avril 2019, suite à un regain d’activisme et des agressions racistes, l’extrême-droite est ciblée par une vague de dissolution via l’article 1 et 6. L’article 7 (terrorisme) n’est pas retenu, malgré les références ouvertes au nazisme et autres groupuscules d’extrême-droite ayant mené des actions terroristes en Europe. Le Bastion Social est dissout, avec six organisations proches : Les Petits Reblochons, l’Association Lugdunum, le Cercle Frédéric Mistral, le Cercle Honoré d’Estienne d’Orves, l’Association Arvernis, et Solidarité Argentoratum. En juillet, le groupe néo-nazi Blood and Honour Hexagone sera également dissout sur la base de l’article 2 et 6.

Article 1 (2012) : « qui provoquent à des manifestations armées dans la rue »

Article 2 (2012) : « ou qui présentent, par leur forme et leur organisation militaires, le caractère de groupes de combat ou de milices privées »

– De février 2020 à août 2021, les décrets de dissolution vont continuer de cibler l’extrême-droite, des organisations musulmanes ou antiracistes. Elles sont toutes en lien direct avec le « terrorisme » et le « séparatisme islamiste » (mobilisant l’article 7), sauf pour les organisations d’extrême-droite.

On constate que les dissolutions sont souvent déclenchées à la suite d’évènements marquants (attentats, meurtres, regain d’activisme), mais là où la première vague de dissolutions en lien avec les attentats de janvier 2015 était intervenue un an après, on remarque une prise en main quasi immédiate cinq années plus tard. En effet, la dissolution de l’association Killuminateam est conjointe avec la mise en examen de son président en février 2020. La dissolution du Collectif Cheikh Yassine intervient dès la fin de la GAV de son fondateur, Abdelhakim Sefrioui, 5 jours après l’assassinat de Samuel Paty. Et l’assassinat sera ensuite instrumentalisé pour légitimer la dissolution du CCIF et de Baraka City.

On peut constater également que l’article 7 (terrorisme) n’apparaît pas dans les motifs de dissolution ciblant l’extrême-droite, malgré les nombreuses condamnations pour terrorisme de ces dernières années, les attentats d’extrême-droite partout dans le monde, et surtout les références idéologiques fascistes. Cette observation confirme toujours un peu plus que la doctrine antiterroriste de l’État vise à protéger l’extrême-droite. La liberté d’expression qui est donnée aux expressions publiques néo-fascistes (légitimation de la torture, chasse aux étrangers, attaques antisociales, négation et soutien à des génocides, réhabilitation mémorielle de figures fascistes, etc.) est hallucinante en comparaison à la criminalisation des propos anti-flics. Et les exemples d’affaires où le Parquet National Antiterroriste (PNAT) n’a pas souhaité se saisir de certains faits est aussi éloquent. Un exemple parmi des dizaines d’autres : le PNAT ne s’est pas saisi suite à l’assassinat de camarades kurdes à Paris en décembre 2022, affirmant que « le racisme n’est pas une idéologie », donc pas politique, donc pas terroriste.

Pas de conclusion

Ce texte se veux une simple contribution aux analyses actuelles sur la répression. Nous espérons susciter des réflexions et surtout promouvoir l’idée que la répression fait système, et que contrairement aux réflexes autocentrés que nous observons souvent dans les milieux gauchistes, il n’y a pas qu’un seul front et les attaques envers d’autres composantes de la lutte (ou hors de nos luttes) sont aussi des attaques contre nous.

Dans ce contexte, on a souhaité insister sur le développement de l’arsenal répressif administratif qui connaît actuellement une croissance inédite. Selon le Syndicat des Avocats de France, « l’action administrative prend ainsi le pas sur la justice » et c’est bien la tendance qui nous inquiète autours de cette question de la dissolution administrative, autant que dans l’arsenal antiterroriste et dans les lois anti-étranger·ères.

Alors que l’institution judiciaire est déjà en voie de militarisation, ce développement extra-judiciaire ouvre la porte à une panoplie d’outils répressifs toujours plus arbitraires et face auxquels l’autodéfense juridique est largement affaiblie. Outre la dissolution administrative, on a vu des camarades kurdes, antifascistes ou écologistes étranger·ères placé·es en CRA et expulsé·es ; des mesures de contrôle post-sentenciels (après l’exécution de sa peine) se généraliser : FIJAIT (20 ans de contrôle), MICAS (jusqu’à 2 ans pour l’instant), déradicalisation (etc.), et parfois hors de tout cadre légal (Kamel Daoudi).

Comme l’analyse le sociologue Samir Amghar à propos des mesures antiterroristes : un des effets recherchés par les milliers de perquisitions administratives, les fermetures de mosquées et les dissolutions à la pelle ; est de pousser à la radicalisation et de produire la menace sur laquelle le gouvernement a fondé son ultime légitimité. Pour utiliser les propos de Darmanin, le gouvernement « favorise un terreau fertile au terrorisme » en renforçant l’islamophobie, le racisme d’État et la guerre aux pauvres.

En même temps qu’il se montre en train de réprimer l’extrême-droite (dissolutions, associations de malfaiteurs, discours de barrage, etc.) l’État promeut la montée d’un certain fascisme dans l’opinion publique afin d’affaiblir l’opposition politique « de gauche » et de pousser à la radicalisation l’extrême-droite.

Cette montée des affects fascisants dans l’opinion publique offre plusieurs bénéfices. D’une part il permet à l’État d’obtenir le consentement des français·es pour une militarisation du régime, en canalisant ces affects vers une dictature militaire (glorification des institutions répressives, patriotisme, mise au travail forcé, etc.). D’autre part il donne l’illusion d’un barrage face à des « extrêmes » (droite, gauche, islamisme) qui mettraient en péril la nation. Et enfin il permet des menées de guerre de classe d’une violence toujours plus assumée.

Cette stratégie de démantèlement sociétal et d’appauvrissement généralisé favorise les faits divers liés à la pauvreté (vols, pétages de plomb, haines, etc.) qui favorisent à leur tour la fascisation de la société et l’empuissantement de la bourgeoisie et de l’État.

Face à tout cela, nous pensons qu’il est indispensable d’élargir nos alliances et nos analyses et surtout d’opposer une solidarité de principe et en actes face à la répression.

La meilleure défense c’est l’attaque !

1 L’obligation de la motivation d’une décision de dissolution est rappelé par le Conseil d’Etat (CE 1984, Fédération d’action nationale et européenne (FANE), n°28070).

2 L’article 431-13 du Code pénal définit : « constitue un groupe de combat, en dehors des cas prévus par la loi, tout groupement de personnes détenant ou ayant accès à des armes, doté d’une organisation hiérarchisée et susceptible de troubler l’ordre public »

La Défense des inculpé·es du 8/12 alertent sur les glissements dangereux de l’antiterrorisme

Le 8 mars 2021, l’agent 1273SI rédige un Procès-Verbal de « recherches en sources ouvertes » depuis les locaux de la DGSI à Levallois-Perret. La recherche porte sur un numéro retrouvé dans le téléphone d’une personne arrêtée 2 mois après le 8 décembre 2020 puis relachée sans suites après deux jours de GAV. C’est un numéro de la LegalTeam de Paris.

L’agent va ensuite s’orienter vers un article de conseils juridiques pour les lycéen·nes qui souhaitent bloquer leurs établissements dans le cadre de mouvements sociaux dans lequel apparait la liste des avocat·es de la LT de Paris. L’agent constate par « corrélation » que certains des ces avocat·es ont été choisis par certains mis en examen.

Il constate également qu’une personne, elle aussi arrêtée, placée en GAV mais libérée sans suite, a utilisé ce numéro à 4 reprises.

L’agent va faire des recherches sur d’autres LegalTeam pour vérifier si les autres avocat·es en font partie. Il trouve le nom de l’une d’elle dans un document de la LT de Rouen « Arrestations – garde à vue 6 points essentiels ».

On ne comprend absolument pas ce que fait ce PV de renseignement dans ce dossier, cela n’ayant rien à voir avec les faits reprochés. Me BOUILLON fera remarquer au Tribunal qu’aucune recherche n’a été effectuée sur l’Airsoft, alors que c’est un point sur lequel reposent des soupçons, par contre la DGSI et le PNAT ont cru pertinent d’ajouter ces informations sur le choix des avocat·es.

Comment ne pas y voir une volonté de criminaliser l’activité militante de ces avocat·es, afin de saper leur Défense et d’élargir à ces dernier·ères le spectre de la présomption de culpabilité au delà des mis·es en examen, comme cela a été fait pour leurs proches ?

Le PNAT reviendra dessus dans son réquisitoire sur ce qu’il nomme « l’opposition concertée à la manifestation de la vérité« . Manifestement, il est insupportable pour ces magistrats radicalisés que des personnes puissent s’exprimer librement, surtout quand elles démentent les fantasmes avérés de la DGSI.

Au cours des audiences, le PNAT demandera plusieurs fois aux mis·es en examen : « avez-vous l’habitude de prévenir vos avocat·es avant de comettre un délit ?« . Les preuves s’estompant à mesure que le procès avance, le PNAT pointe désormais le soupçon du mensonge pour faire tenir le scénario initial de la DGSI.

Il est difficile de ne pas voir dans le jeu du PNAT la lente chute vers la légitimation de formes de tortures blanches.

En effet, alors que les propos obtenus en GAV dans les geôles de la DGSI sont contestés par les prévenu·es: avec des preuves d’écriture de faux par les agents, mais aussi de pressions psychologiques intenses, des « off » nauséabons, des mensonges pervers, des menaces (15 années de prison), des analyses de personnalité (basées sur plusieurs mois d’écoutes), des menaces d’agression sexuelle et des administrations de Tramadol et d’Antarax ; le PNAT s’évertue à s’appuyer sur ces propos et à instiller la présomption de mensonge sur les déclarations faites devant le Tribunal, en concertation avec les avocat·es. C’est un glissement dangereux et grave.

On a pu voir comment des élus d’extrême-droite assimilent les avocat·es en antiterrorisme aux « terroristes » qu’ils défendent. On a pu voir à Bure le Parquet tenter d’inclure un avocat dans l’association de malfaiteurs. On voit dans des pays où l’antiterrorisme s’est sur- développé que les avocat·es sont toujours les prochain·es sur la liste, à l’instar des journalistes, des artistes, des activistes, syndicalistes, etc. La Turquie et la Russie en sont des exemples effrayants.

Nous dénonçons l’extension dangereuse de la présomption de culpabilité et la lente extension du non-droit planifiée par le PNAT. L’antiterrorisme est l’avant-garde de la deshumanisation.

Soutien812bzh.

Le Syndicat des Avocats de France dénonce : « Au-delà de la grossièreté d’un tel sous-entendu, il est surtout incroyablement dangereux et alarmant dans ce qu’il révèle de la conception des droits de la défense de la part du Ministère Public, et donc du ministre de la Justice, pourtant ancien avocat, et de la DGSI.« 

Le Conseil National des Barreaux dénonce : « l’existence même d’un tel procès-verbal ayant conduit à commenter ou même à simplement rapporter les modalités du choix d’un avocat qui, par les sous-entendus qu’il induit, laisse entendre que ce choix serait considéré comme un indice de la commission d’une infraction ; et la violation par le Ministère public du principe d’impartialité auquel il est tenu en vertu de l’article 31 du code de procédure pénale.« 

La Défense des inculpé·es du 8 décembre dénonce : « la façon dont la police et le parquet se sentent pousser des ailes, dès qu’il s’agit de terrorisme, quitte à oublier quelques principes de base.« 

L’Association des Avocats Pénalistes dénonce : « toute forme de pression mise en oeuvre la Défense et l’exercice de ses droits.« 

#Procès812 : un procès politique contre la gauche d’en bas.

Le procès des inculpé·es du 8 décembre a démarré ce mardi 3 octobre dans une ambiance tendue. Vous pouvez suivre les chroniques publiées chaque jour sur AuPoste ! et les compte-rendus de la première semaine d’audience.

L’audience est publique, du mardi au vendredi, à partir de 13h30. Le verdict est prévu pour le vendredi 27 octobre, venez nombreux·ses pour soutenir les camardes !

Cette première semaine d’audience aura validé une certitude : ce procès est guidé par la présomption de culpabilité et ce sont les opinions politiques des inculpé·es qui sont criminalisées.

Si Olivier Cahn dénonce dans le reportage de Blast ! une association entre le « terrorisme » et l’« action directe », les enjeux de ce procès vont pour nous bien plus loin car en l’occurrence: aucune action directe n’est reprochée aux inculpé·es.

C’est sûrement le cas pour les opérations menées par la SDAT ces derniers années (Ivan Alocco, 15 Juin Limousin, Lafarge), mais concernant l’affaire du 8 décembre, les enjeux répressifs vont bien au-delà de la répression de l’action directe. L’enjeu principal est, non pas d’étendre l’interprétation du « terrorisme » dans le droit à ce qui relèverait de dégradations et de sabotages, mais plutôt de créer les possibilités légales de réprimer des engagements politiques révolutionnaires (vrais ou supposés) dans le cadre du « pré-terrorisme ».

Les exemples de l’évolution de la législation antiterroriste turque, italienne ou étasunienne sont parfaitement illustratifs de cette stratégie qui vise à long terme à faire entrer toute expression subversive dans le champ répressif de l’antiterrorisme.

Comme l’écrit le PNAT dans son réquisitoire : « l’ultragauche est multiple et protéiforme » et son action va de la distribution de tracts à l’engagement armé, en passant par toutes les formes de militantisme (la quasi-entièreté étant légales : syndicalisme, associatif ou autonome).

Le PNAT se place dans la droite lignée des doctrines de « contre-subversion » théorisées par les militaires de la DGR, enseignées dans leurs « écoles du terrorisme » et appliquées cruellement pendant la guerre d’Algérie (voir Terreur et Séduction de Jérémy Rubenstein et L’Ennemi Intérieur de Mathieu Rigouste). Cette doctrine considère qu’il existe un mécanisme de « pourrissement révolutionnaire », qui partirait des actions de « basse intensité » et aboutirait au renversement de l’État. Il faut donc, pour maintenir l’ordre et la sécurité à moindre frais, tuer dans l’oeuf.

Là est l’enjeu répressif du procès des inculpé·es du 8 décembre. C’est d’ailleurs mot pour mot ce qui est au cœur des soupçons contre les inculpé·es : iels auraient aimé l’idée de « renverser l’État ».

« Un procès qui va mal se passer » : la Défense en tension.

Ce procès est un moment clé du processus de fascisation mondiale dans sa déclinaison française. Rien d’étonnant donc que les juges aient méticuleusement refusé toutes les demandes de la Défense dès le premier jour.

Selon le PNAT, il n’y a aucune raison de « douter de la loyauté » des agents de la DGSI. La juge semble approuver. Son pouvoir de faire citer de force des témoins ne sera pas appliqué pour 1207SI et 856SI, auteurs de plus de 150 PV au dossier, dont beaucoup présentent des « erreurs matérielles ».

Aucune raison non plus de renvoyer l’audience au jugement du Conseil d’État qui doit statuer sur la légalité des écoutes administratives à l’encontre de Libre Flot depuis son retour du Rojava. C’est la productivité de l’appareil judiciaire qui prime.

Ce procès qui « commence très mal » selon Kempf, risque aussi de se finir très mal. Un retard d’au moins une journée est déjà pris et les sujets les plus importants ont été mis à la fin au risque de passer à la trappe : la question du « projet » et de la « clandestinité » (par les moyens de communication).

« Pour mieux vous connaître » : pathologisation des victimes de la barbarie policière.

Suite à cette première journée de refus d’entendre la Défense, deux journées d’audience ont été consacrées à « la personnalité des prévenu·es ». Leurs parcours de vie et leurs états d’âme les plus intimes sont ainsi passés au crible pendant en moyenne deux heures par inculpé·e.

Les profils de chacun·e, liés à des parcours de grosse galère parfois ; et de liberté et de projets d’autonomie face à l’avenir le plus souvent ; ne semblent guère intéresser les magistrates que dans leur potentialité « violente » et pathologisante.

Les questions reviennent en permanence sur : les addictions (drogues et alcool), la période de confinement, les traumatismes liés aux violences policières sur les ZAD.

Les juges sont obnubilées par le ressentiment que pourraient avoir les inculpé·es face à « des mains arrachées, des viols par la police » et à « la mort » de Rémi Fraisse, assassiné par un gendarme armé d’une grenade.

Le sous-titre est clair et nauséabond : vous avez des traumas et de la haine anti-flics, ce qui vous rend fragile et dangereux vu les faits reprochés. Ou comment les horreurs commises par les flics sont retournées pour tenter de criminaliser les compagnon·es du 8 décembre.

Un exemple effarant :

– une juge assesseure revient sur l’enfance de Svink et un accident de scooter dont il paye encore les frais aujourd’hui. Il a 39 ans, il en avait 15 à l’époque. Il est renversé par un ivrogne au volant, un flic en fin de service. Il voit ensuite débarquer sur son lit d’hôpital, le flic et ses collègues qui font pression sur lui pour qu’il ne porte pas plainte. La juge ne se questionnera pas sur le dénouement, mais sur les liens avec son tatouage « ACAB » et surtout, les « faits » qu’on lui reproche aujourd’hui, 21 ans plus tard, à savoir : être passionné d’effets spéciaux et avoir le droit de manipuler des matières « actives », – mais pas avec quelqu’un qui revient du Rojava semblerait-il.

« Au nom du peuple français » : les critiques universitaires érigées en intentions terroristes.

« Nous ne sommes pas là pour vous juger sur vos opinions politiques » affirmait la Présidente le premier jour d’audience, laissant la salle plus que dubitative. Le doute s’est très vite levé les jours suivants, lorsque -entre autres- Camille a dû s’expliquer pendant une heure sur une lettre adressée au juge d’instruction dans laquelle des sociologues et historien·es critiques de la justice étaient cité·es.

Elle avait lu en détention des ouvrages tels que : « Sous l’œil de l’expert. Les dossiers judiciaires de personnalité » de Ludivine Bantigny et Jean-Claude Vimont ; « Mauvaise graine. Deux siècles d’histoire de la justice des enfants » de Véronique Blanchard et Mathias Gardet ; ou encore la criminologue Louk Hulsman citée dans « Crimes et Peines » de Gwenola Ricordeau.

Selon l’assesseure donc, les citations suivantes « en disent long » sur ses opinions politiques ; et par glissement dangereux sur « les faits que l’on vous reproche » :

« Le face à face entre les mots des jeunes et ceux des experts est d’une violence inouïe. Il en dit long sur les préjugés de classe, le sexisme et le racisme qui prévalent alors conduisant à des décisions de justice aberrantes, lourdes de conséquences pour une jeunesse certes surveillée mais ni écoutée ni entendue. »

« Arc-boutés à la conviction de mesurer scientifiquement la personnalité des individus, médecins, psychologues, éducateurs et magistrats finissent par les enfermer, au cœur de leurs dossiers, dans des catégories souvent figées qui déterminent tour à tour le destin de la personne jugée. »

« La notion d’illégalisme permet de mettre à jour la fausse neutralité des catégories juridiques qui représentent « l’ordre » et le « désordre » comme des faits historiques stables et universels, comme des faits objectifs dépourvus de tout jugement de valeur ».

La juge assesseure va très vite laisser tomber les questions de personnalité pour s’enfoncer dans un face à face agressif : « La juge que je suis se doit de vous poser la question » assènera-t-elle avant de stupéfier la salle en s’écriant : « Le Tribunal rend la Justice au nom du peuple français ! ».

Cette démonstration d’autoritarisme suscitera des réactions de soutien dans la salle, que le Procureur fera sanctionner immédiatement (par l’expulsion d’une personne). La mère, le père, le frère et des proches de la mise en examen sortiront en guide de protestation.

Inscrivez greffier : dans la France de 2023, on ne critique pas la justice ; le concept universitaire de « criminalisation » est un « néologisme » ; et un mémoire de littérature une pièce à conviction dans un dossier terroriste.

« Pouvez-vous être à deux endroits en même temps ? » : la DGSI et la fiction judiciaire.

Certains disent, dans le monde pénal, que les renseignements intérieurs ont gardé un réel traumatisme du fiasco de l’affaire dite « de Tarnac ». C’est sûrement faux : les effectifs ont largement changé et leur image a été redorée jusque dans la gauche radicale (grâce aux attentats djihadistes et les sources de Médiapart).

Cependant on remarque d’autres types de troubles dont l’ensemble de la chaîne pénale présente des symptômes : la paranoïa et la mythomanie.

Nous avions déjà ironisé sur le fait qu’une « chouette team » puisse devenir, -passant le prisme d’un agent de la sécurité intérieure sous pression politique-, une « shot team ». Cette fois, nous avons d’un côté une sonorisation qui enregistre ce que Svink fait : « tapoter avec un marteau et une spatule dans un plat » (selon ses explications). Et de l’autre côté, un rapport de filature qui affirme entendre « des tirs d’airsoft en rafale ». Encore un PV faux qui en dit long sur la subjectivité des agents.

Mais la supercherie policière prend toute sa gravité quand elle fait loi en terminant dans la tête d’une juge. Ce n’est qu’à la fin de l’audience qu’on se rendra compte que, plusieurs heures durant, un inculpé a été sommé de s’expliquer sur des propos qu’il n’a pas tenu il y a trois ans.

Il aura fallu attendre qu’un avocat demande à passer l’audio « original » d’une sonorisation pour qu’on se rende compte que les propos retranscrits n’ont tout simplement pas été dits.

L’extrait en l’occurrence était une phrase banale : « il faudra prendre des bonnes habitudes » transformée en « prendre des objectifs ». Qu’est-ce que ces objectifs, demandait la juge solennellement ? Que peut bien cacher cette phrase ? Tout simplement, rien.

Ni la juge, ni le PNAT n’ont pris la peine de vérifier leur sources. Pas plus que la juge ne se soit renseignée sur la loi concernant le statut d’artificier. Une vraie parodie qui se donne des airs graves.

Les retranscriptions de sonorisations sont pourtant la matière première de ce dossier explosif, raison pour laquelle la Défense demandait la citation des deux agents les plus prolifiques. Des expertises sont réalisées sur la base de ces retranscriptions, des accusations graves aussi. Tout laisse à penser que des manipulations opérées par les agents eux-même rendent beaucoup de retranscriptions fausses.

La juge était pourtant prévenue.

Relaxe pour les inculpé·es du 8 décembre !

Objet : refus d’une enquête de personnalité et des expertises psychologique et psychiatrique.

Lettre considérée comme indice d’intentions terroristes par la justice française en 2023.

À Jean-Marc HERBAUT,
Juge d’instruction antiterroriste
Tribunal Judiciaire de Paris
Parvis du Tribunal de Paris
75859 PARIS CEDEX 17

Objet : refus d’une enquête de personnalité et des expertises psychologique et psychiatrique.

Monsieur,

Je reviens vers vous à la suite du refus exprimé par mes conseils de me soumettre à l’enquête de personnalité et aux différentes expertises ainsi que mon refus de répondre aux questions de l’enquêtrice venue me rencontrer à la Maison d’Arrêt des Femmes de Fleury-Merogis.

Je tenais par ce courrier à vous réaffirmer mon refus mais surtout à vous en expliquer les raisons.

Si je comprends que la demande de ces enquêtes s’inscrit dans le protocole du traitement des affaires criminelles, je tiens tout d’abord à rappeler que je refuse le chef d’inculpation pour lequel je suis poursuivie. Il me semble en outre que la démarche même de ces enquêtes est problématique pour plusieurs raisons.

Les mois d’enquête préliminaire dont j’ai fait l’objet n’ont visiblement servi qu’à dresser un portrait falsifié de ma personne, ne retenant de mes mots et de mes activités qu’une infime partie, toujours décontextualisée et uniquement destinée à m’incriminer au détriment de tout autre élément me caractérisant.

N’est il pas alors ironique que l’appareil judiciaire cherche désormais à déterminer qui je suis ? Ce processus réducteur m’ayant déjà valu plusieurs mois de détention provisoire, n’est il pas étrange de vouloir me soumettre à de telles enquêtes et expertises alors même que la possibilité de me décrire et de m’auto-identifier m’a préalablement été enlevée ? Et comment croire en la sincérité et en l’objectivité de telles enquêtes après avoir observé l’emploi d’une telle méthodologie ?

La sociologie nous enseigne depuis des décennies qu’il ne peut y avoir d’expertises neutres lorsque la personne est préalablement mise en situation d’infériorité (physique, psychologique, morale, etc…). Lorsque Véronique Blanchard décrit « l’aridité des rapports médicaux et sociaux aux allures d’autopsie » je ne peux déjà m’empêcher de penser aux rapports de la DGSI par lesquels vous m’avez rencontrée, ainsi que mes co-inculpés, et dans lesquels des moments de nos vies ont été machinalement disséqués, vidés de leur contenu et décontextualisés à foison.

Il apparaît dès lors dans ce type d’enquête que la personne s’efface pour devenir un « sujet », observé, analysé, comme je l’ai déjà vu noté dans plusieurs rapports joints à ce dossier. Je ne suis pas un sujet et je ne pense pas qu’une personne m’ayant vue une fois dans un contexte si particulier soit apte à retranscrire un portrait fidèle de qui je suis.

Il ne fait guère de doute pour moi que ces nouvelles enquêtes demandées constitueront, une fois de plus, autant de filtres déshumanisants et d’écrans posés sur des propos, mettant inéluctablement à distance la personne expertisée de son interlocuteur.

Les analyses de ce types de processus sont nombreuses. On peut parmi elles retenir les constats implacables de Véronique Blanchard ainsi que Mathias Gardet ou encore ceux exposés dans le recueil d’analyses de Ludivine Bantigny et Jean Claude Vimont :

« Le face à face entre les mots des jeunes et ceux des experts est d’une violence inouïe. Il en dit long sur les préjugés de classe, le sexisme et le racisme qui prévalent alors conduisant à des décisions de justice aberrantes, lourdes de conséquences pour une jeunesse certes surveillée mais ni écoutée ni entendue. »

« Arc-boutés à la conviction de mesurer scientifiquement la personnalité des individus, médecins, psychologues, éducateurs et magistrats finissent par les enfermer, au cœur de leurs dossiers, dans des catégories souvent figées qui déterminent tour à tour le destin de la personne jugée. »

Ainsi, au vu de la présomption de culpabilité incessante et harassante à laquelle nous faisons face dans ce dossier, je ne peux que vous demander sous quelles « normes d’époque » mes propos sont-ils et seront encore analysés, interprétés et jugés ?

Pour finir, si l’incapacité de ces enquêtes à répondre à la recherche d’objectivité qui serait leur mission première ne fait plus de doutes, il me semble important de souligner que, comme le fait remarquer le criminologue Louk Hulsman, « la notion d’illégalisme permet de mettre à jour la fausse neutralité des catégories juridiques qui représentent « l’ordre » et le « désordre » comme des faits historiques stables et universels, comme des faits objectifs dépourvus de tout jugement de valeur ».

En effet, si l’auteur insiste sur le fait que « le crime n’a pas de réalité ontologique », il souligne par ailleurs la difficulté d’expression et de défense des personnes qui en sont accusées : « Les conflits qui se produisent dans la société entre des personnes ou des groupes sont définis dans le système pénal non pas selon les termes des parties impliquées, mais plutôt en terme de régulation (droit pénal) et d’organisation du système lui même. Les parties directement impliquées dans un conflit n’ont que peu d’influence sur le cours des événements dès lors que le problème a été défini comme criminel et a été pris en charge en tant que tel par le système ».

Dans un soucis de manifestation de la vérité, ceci laisse entrevoir en quoi il est important de réhabiliter largement la parole des accusé·es et judiciarisé·es. Cela montre aussi l’importance de ne pas laisser la justice s’auto-alimenter dans ses propres mécanismes psycho-institutionnels.

Alors que cette enquête semble reposer bien plus sur de la présomption et de l’interprétation que sur ce qui pourrait être considéré comme des preuves ou des faits par la justice, vous comprendrez ainsi que je ne peux me permettre de laisser mes propos en proie à des tels mécanismes.

Je réaffirme alors par la présente ma capacité à parler par moi même et pour moi même.

En vous souhaitant bonne réception de ce courrier.

Camille,

Le 3 novembre 2021.

Notes de la DGSI concernant « l’ultragauche » et autres considérations policières.

Des notes de la DGSI concernant la mal nommée Ultragauche à partager, diffuser, lire, commenter, critiquer, se moquer, foutre en boule, brûler… (liste non exhaustive).

Paru le 18 septembre 2023 sur Iaata.info.


Quand on a la chance d’avoir des amis accusé.es de terrorisme d’ultragauche, on apprend pas mal de trucs sur la police et plus particulièrement sur les renseignements généraux, appelés aussi DGSI.

On découvre ainsi les talents cachés de composition écrite et d’historiens hors pair de ces agents de la police secrète des Hauts de Seine (la crème de la crème parait-il).

C’est ainsi que nous avons pu lire avec délectation ce que la DGSI aime à raconter au PNAT, à la justice et aux médias à propos de ce qu’elle nomme, d’après sa propre définition (qui ne fait même pas consensus) : « L’ULTRAGAUCHE ».

Ça parle de black bloc, de squat, d’action directe, de Grèce, de contre-culture, et d’anti-tout. Et cette soupe reprise sans sourciller par le Juge d’instruction et le PNAT sert d’introduction à l’affaire du 8 décembre 2020, mais aussi à priori à d’autres affaires. On nous explique que si on dessine des A cerclés et qu’on porte un sac a dos noir en manif c’est qu’à priori on fait partie de « l’ultragauche » et que donc on va sûrement buter quelqu’un au hasard de notre misérable haine anticapitaliste. Certes ça fait longtemps que ça n’est pas arrivé… Mais vu le passif de ces mouvements ça pourrait…En tout cas y’a de quoi faire trembler un juge bourgeois !

Il n’est pas question ici de remettre en question les faits passés, ni leur portée, ils ont existé et nourrissent les réflexions et pratiques des mouvements révolutionnaires et anarchistes. Et malgré tout les moyens déployés par la police pour surveiller particulièrement ces groupes politiques, cette analyse est bien loin de leurs réalités. Et à vrai dire on s’en fout de ce que pensent les flics, foutez nous la paix !

Et comme la police a dans son viseur les rappeurs qui ont la rage, des idées et qui mâchent pas leur mots, la DGSI en profite pour ajouter une note sur les textes du rappeur Enedeka Maska de l’excellent label coutoentrelesdents. Dommage que N2K n’ait rien publié depuis 2014, sa prose est bien plus riche et intelligible que celle des shtars.

Bref, on s’est dit que ce serait dommage de garder ça que pour nous, entre initiés des cochonneries de la DGSI, et que cela vaut le coup de partager ces pépites. On vous invite même à en faire des lectures collectives, non pas pour vous nourrir de cette histoire raccourcie au taser des mouvements d’extrême gauche ayant eu recours à la violence, mais plutôt pour se faire une idée de ce qui se raconte sur les bureaux de la DGSI et du PNAT. On a trouvé l’occasion intéressante pour soulever pas mal de questions, par ce qu’on aime bien s’en poser des questions, et que contrairement à la DGSI et le PNAT on ne vit pas qu’avec des certitudes déconnectées de toute réalité.

« Par « ultragauche » nous désignerons donc ici la frange de l’extrême gauche non légaliste qui rejette les partis et prône l’utilisation de la violence pour aboutir à cette transformation de la société. » allez hop emballé c’est pesé, vous êtes prêt.es ? De la tenue, aux symboles, en passant par les maisons d’éditions et quelques luttes, un beau ramassis…

Alors si on avait pas compris, l’ultragauche est VIOLENTE. Basique. Mais les flics vont sûrement pas perdre leur temps à philosopher sur l’éthique de l’usage de la violence. Bah non, c’est les seuls légitimes à en faire usage avec leur potes militaires. Qui voudrait remettre ça en question ? Ici ils nous font un petit historique, Action Directe est en haut de l’affiche (chaud bouillants !)

Oubliez les plages de rêve et les souvlakis, la Grêce est un pays habités par de dangereux révolutionnaires. Le coté réseau international de conspirateurs, ça en jette un peu plus. Une brochure sur le groupe « conspirateurs des cercles de feux » et quelques voyages, justifie la présence de cette note. On vous épargne de la note sur l’ELN…

Le bonus track : l’agent 1194 fait un commentaire de textes de rap pour faire décoller sa carrière à Levallois Perret. 2/20. N2K à mis la DGSI en PLS.

ACABisous.