BINGO! Quel terroriste d’ultragauche es-tu ?

50 questions que la DGSI pose en garde-à-vue antiterroriste.

Il y a deux ans, le Ministère de l’Intérieur orchestrait l’opération antiterroriste du 8 décembre 2020, en pleine mobilisation contre deux lois extrêmement liberticides : sécurité globale et séparatisme. Le gouvernement se vantait alors d’avoir « neutralisé » des « activistes violents d’ultragauche » qui auraient eu pour projet de « s’en prendre aux forces de l’ordre ».

Ces camarades virent la DGSI et ses petits soldats du GAO et du RAID les arracher à leur sommeil. Viseurs laser pointés sur elleux, menottes, sac sur la tête, iels étaient embarqué.es dans des fourgons banalisés en direction des sous-sols de la police antiterroriste parisienne afin d’y être séquestré.es pendant plus de trois jours d’interrogatoires. Cinq d’entre elleux furent incarcéré.es pendant de longs mois, avec tout le panel des mesures « antiterroristes » appliquées en prison.

Voilà donc deux ans que le spectre du « terrorisme » politique de gauche a donc refait son apparition dans le spectacle sécuritaire.

Suite au meurtre ciblé de trois camarades kurdes à Paris ce 23 décembre 2022, c’est avec écœurement que nous avons entendu Ducont-Moretti affirmer sans honte que « le racisme n’est pas une idéologie » et que l’auteur de ces crimes ne pouvait donc pas être poursuivi pour « terrorisme ».

Le gouvernement rappelle encore une fois ô combien l’antiterrorisme est un outil de répression des idéologies subversives (qu’elle soient fascistes ou révolutionnaires), et ô combien le racisme est compatible avec l’ordre républicain.

L’adhésion présumée à certaines idées de nos camarades du 8/12 tient une place centrale dans l’accusation qui leur est faite. De la DGSI au PNAT, la criminalisation de leurs engagements politiques est l’axe principal permettant d’alimenter une présomption de culpabilité qui semble se suffire à elle-même. Ce degré extrême de répression des idées révolutionnaires a pour objectif de purger la société de ses éléments contestataires afin d’imposer un régime néo-fasciste. Des pans de plus en plus larges du mouvement social sont visés par les dispositifs antiterroristes : black blocs, écologistes, anarchistes, grévistes, (pro)kurdes, journalistes d’investigation, etc.

Voilà pourquoi il nous a semblé important de vous partager ces 50 questions qui ont été posées par la DGSI aux inculpé.es lors des gardes-à-vue à Levallois-Perret entre le 8 et le 12 décembre 2020.

True Story.
#FuckDGSI

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ALORS, QUEL TERRORISTE D’ULTRAGAUCHE ES-TU ?
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« De fait, l’ultragauche est multiple et protéïforme »
Parquet National Anti-Terroriste

L’« ultragauche » est une construction policière qui a pour intérêt d’englober pêle-mêle la multitude des luttes sociales qui échappent au contrôle électoral, associatif et syndical. Le PNAT considère que la menace d’ultragauche se dissimule dans un vaste panel de lieux et de pratiques. Pratique !

Dans ses réquisitions de novembre 2022, le PNAT associe à une « menace terroriste » :

☠ « un certain nombre de maisons d’édition » (La Fabrique, Agone, Entremonde, Libertalia, etc.)

☠ « une myriade de sites internet » (Lundi Matin, Attaque, Chronique de la guerre sociale en France, La Horde, Paris Luttes Info, La Bogue, IAATA, ect.)

☠ « un militantisme non-violent » (tractage, organisation de concerts, collage, graffiti, piquets de grève, soutien logistique à des grèvistes et des ressortissants étrangers, etc.)

«certains espaces de rencontres » (bars associatifs, clubs de sport, centres sociaux, collectifs d’habitants, librairies, squats, etc.)

« certains espaces ruraux désertés » (Cévennes, Corrèze, Ariège, Tarn, Ardèche, Dordogne, etc.)

« les dégradations de biens privés ou publics » (champs OGM, caméras de surveillance, antennes relais, armoires de fibre optique, banques, multinationales, véhicules de gendarmerie, etc.)

« l’occupation illégale de lieux » (squats, occupations, ZADs, etc.)

« des actions coup de poing » (attaques de permanences de partis, affrontements avec des militants d’extrême-droite, black bloc, actions de solidarité internationale, etc.)

Il peut y avoir plusieurs manières de réagir face à une GAV antiterroriste. La plus recommandée est d’exercer son droit à garde le silence. Cependant, vu la « gravité » des soupçons qui pèsent sur toi, ta non-collaboration sera considérée comme un aveu de culpabilité, ou une « preuve » que tu es un.e militant.e aguerri.e. Tu iras probablement en détention provisoire, mais ta défense sera plus « facile ».

Une fois le dossier entre tes mains, tu sauras à quoi t’en tenir.

Les conditions d’une GAV antiterroriste sont particulières : privation sensorielle et temporelle, interrogatoires très intensifs (entre 300 et 800 questions), instabilité émotionnelle due à l’arrestation spectaculaire, menace d’une peine de prison démesurée, techniques de manipulation des enquêteur.ices, etc.

Il n’y a pas de honte à craquer, pleurer, répondre aux questions, etc. Ce sont des professionnels qui ont accumulé des décennies d’expériences pour « faire parler » leurs suspects. Mais il ne faut jamais oublier : chaque question (même anodine) a pour objectif que tu t’incrimines toi-même ou que tu incrimines d’autres personnes. Les agents te mentiront aisément.

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POUR S’ARMER FACE À LA GARDE A VUE
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« Comment la police interroge et comment s’en défendre » du Projet Évasions
Disponible en téléchargement sur le site: https://projet-evasions.org/

« Petit manuel de défense collective: de la rue au tribunal » de Riposte Collective
Disponible sur le site: https://infokiosques.net/

C’était il y a deux ans : l’opération antiterroriste du 8 décembre.

On s’en souvient comme si c’était hier. Neuf camarades aux idéaux anarchistes et communistes se faisaient violemment arrêter par des polices militaires (GAO, GIGN) sous ordres de la DGSI. Un squat fréquenté par des centaines de personnes pris d’assaut, l’intimité des familles violée dans des perquisitions qui durèrent des heures, les camarades inculpé.es embarqués avec un sac sur la tête, des flics sur-armés, viseurs laser et doigts sur la gâchette, la terreur policière.

Après presque 4 jours de GAV à Levallois-Perret, 7 étaient mis.es en examen pour « association de malfaiteurs terroristes », les discours policiers fuitaient dans les médias proches du Parquet National Anti-Terroriste (PNAT) : Le Point, Valeurs Actuelles, Le Figaro.

Sous le choc, des proches et des camarades se sont spontanément montés en groupes de soutien, à Toulouse, en région francilienne, à Amiens, à Rennes… Nos potes des terroristes ? C’est quoi ce délire ?

RELIRE : Lettre d’Ami.es depuis Toulouse https://iaata.info/Lettre-d-ami-es-depuis-Toulouse-4585.html

Cinq d’entre elleux étaient envoyés en prison, sous statut DPS (Détenus Particulièrement Signalés). Traité en dangereux sanguinaire, un était mi en Quartier d’Isolement, la prison dans la prison. Libre Flot, après avoir pourtant combattu Daesh et protégé les français.es du terrorisme en participant à la libération de Raqqa, était traité comme « ses petits amis de Daesh » comme le dira Jean-Marc Herbaut, juge d’instruction à charge de l’affaire.

Les « faits » reprochés ? Avoir essayé de fabriquer une petite quantité d’explosif en regardant un tuto sur internet et avoir fait quelques fois de l’Airsoft pendant le confinement. Détenir pour certains de vieilles armes, légalement, et pour un autre, un fusil à canon scié trouvé en vide grenier.

REVOIR : 30 JANVIER : Prise de Parole – Rassemblement contre les lois liberticides https://www.youtube.com/watch?v=XtsKyJmpCSQ

A ces faits, qui devraient relever du droit commun, s’ajoute donc la dimension intentionnelle. Et c’est là qu’entre en jeux dans le droit français le crime d’opinion, le crime d’être révolutionnaire. Des paroles de rap, des débats enivrés, des lectures, un style de vie, deviennent les « preuves » absolues qu’il y a un « projet d’action violente ». Quelle cible ? Où ? Quand ? Comment ? On ne saura jamais, puisque la suspicion fait preuve dans un régime fasciste.

Il faut dire que le scénario est parfait pour les imaginaires policiers. Un « revenant » du Rojava leader charismatique, son ami de jeunesse un punk artificier qui est passionné par sa profession, son copain squatteur qui est parti quelques mois en Colombie, et sa compagne aux « compétences informatiques »…

RELIRE : Récit d’une mise en examen pour association de malfaiteurs terroristes. https://soutien812.blackblogs.org/2022/03/01/recit-dune-mise-en-examen-pour-association-de-malfaiteurs-terroriste/

Plusieurs dizaines de fonctionnaires, grassement payés et profondément anti-gauchistes, passent ainsi des mois à ficeler ce récit, en additionnant des éléments de la vie privée des personnes, sans tenir compte ni des contextes, ni de la chronologie, ni des projets réels mis en œuvre dans la vie réelle des personnes.

Tout ce récit est faux. Il n’y a ni groupe ni projet. Mais nous ne sommes plus dans le mensonge grossier et crapuleux comme à l’époque de Tarnac, les « services » apprennent de leurs erreurs, et l’islamophobie de la Justice fRançaise a permis de rendre bien flous les contours de « l’association de malfaiteurs » sur le dos de la communauté musulmane.

Nous avons affaire à une production minutieuse d’un récit implacable, face auquel il a été difficile de se défendre. La parole des inculpé.es a été systématiquement méprisée. L’isolement carcéral (et les souffrances psychiques qu’il cause) a permis à Jean-Marc Herbaut de mener des interrogatoires iniques, à tel point que le camarade devait demander à avoir les questions sur papier afin d’y comprendre quelque chose. Et si Libre Flot n’avait pas entamé une grève de la faim, qui durera 36 jours, il serait toujours entrain de s’observer décrépir dans ces lieux de torture que sont les Quartiers d’Isolement, sans accès à son dossier.

REVOIR : Journée Internationale de Soutien à Libre Flot (4 avril 2021) https://expansive.info/Libre-Flot-amour-et-solidarite-internationale-3230

La parole de la Défense a été balayée tandis que celle du PNAT est en roue libre. Dans ses réquisitions rendues le 23 novembre dernier, les magistrats enivrés de patriotisme se permettent même à verser dans le conspirationnisme le plus éhonté et la diffamation.

Une nouvelle entorse au « secret d’instruction » par des magistrats à conduit dernièrement à un article sur Le Figaro tellement mensonger qu’il a été modifié le jour même sous peine de poursuites. Il y était affirmé que le camarade Libre Flot était en fait… André Hébert, militant internationaliste et auteur du livre « Jusqu’à Raqqa ». Encore une dinguerie.

Aux camarades et ami.es qui nous lisent, nous savons que ces attaques ne cesseront pas et vont reprendre de plus belle à l’approche du procès, qui devrait arriver d’ici quelques mois. Soyons prêt.es et solidaires.

En ce 8 décembre 2022, nous souhaitons rappeler à touxtes que l’outil antiterroriste est une avant-garde de la militarisation de la société. Qu’il permet l’extension du non-droit par la création d’ennemis intérieurs, dans notre cas : « l’ultragauche », qui ne se résume pas à quelques « fanatiques idéologisés » mais au contraire touche une immense partie du mouvement social, de l’écologie aux luttes antiracistes et décoloniales. Accepter que sept d’entre nous soient assimilés à des meurtriers en masse c’est accepter qu’on le soit touxtes dans le futur. C’est un pas de plus dans la fascisation du régime.

Solidarité internationaliste à toutes les victimes d’État, de leurs geôles, leurs milices armées, leurs frontières. Nous savons touxtes qui terrorise qui.

Soutien812.

RÉÉCOUTER : Radio Pikez – Antiterrorisme et Désinformation https://hearthis.at/radiopikez/radio-pikez-antiterrorisme-et-desinformation-lors-du-festival-intergalactique-2021-12-03/

Pour soutenir financièrement les inculpé.es et leurs proches, il est possible de participer aux frais d’avocat.es ici : https://solidaritytodecember8.wordpress.com/

Libre Flot libéré du bracelet électronique!

Le 28 septembre dernier, Libre Flot était convoqué par le juge d’instruction pour décider du renouvellement de son placement sous ARSE. L’entrevue était prévue dans les bureaux du Palais de Justice de Paris, en présence d’un procureur du PNAT et de la Défense. Contre toute attente, le juge d’instruction a décidé de lever le dispositif d’incarcération à domicile sous surveillance électronique le 28 septembre dernier!

Libre Flot avait préparé une déclaration qu’il souhaitait lire au juge, revenant sur les traitements qui lui ont été faits, sur les biais de l’instruction et de l’enquête, et demandant la fin de son traitement spécial vis à vis des autres inculpé.es. Le représentant du PNAT a, quant à lui, tenté une nouvelle fois de lui pourrir un peu plus la vie, en évoquant encore une supposée « dangerosité » du copain, sortant de son chapeau d’autres fantasmes ridicules de la DGSI qui seront vite balayés par les avocats. Quant au juge, qui n’a pas pu se permettre ses bassesses habituelles vu la présence d’un procureur, il a jugé en bon patriarche que le « bon comportement » du camarade face à ses SPIP et experts en radicalisation pouvait être récompensé par la levée de l’ARSE.

Cette levée de l’ARSE est un grand soulagement pour Libre Flot, il va pouvoir reprendre un nouveau souffle, continuer de se reconstruire et préparer sa défense. Il reste cependant sous la contrainte d’une interdiction de sortir du département et d’une obligation de pointage à la gendarmerie chaque semaine.

C’est encore une maigre victoire, vu les chefs d’inculpations qui pèsent toujours inconditionnellement sur les inculpé.es et le procès qui arrive.

Après les peines, l’heure du châtiment ?

APRÈS LES PEINES, L’HEURE DU CHÂTIMENT ?

« Le châtiment s’ancre dans l’histoire la plus archaïque de l’humanité, celle des terreurs suprêmes que les hommes ont traduites en dieux et déesses au cœur démoniaque. Pas une religion pour sauver l’autre lorsqu’il est question des supplices réservés aux damnés. »

« La Loi n’est pas l’expression d’une éthique quelconque : au service du pouvoir disposant
des plus grandes forces de coercition, elle n’existe que par la sanction. »

« Le discours sécuritaire sème le vent. Il récoltera des tempêtes sur des incendies. »

– — – — Pourquoi faudrait-il punir ? – Catherine Baker (2003) – — – –

 

Depuis plusieurs mois nous n’avons pas donné de nouvelles, profitant un tant soit peu d’un « répit » depuis la sortie de prison du dernier inculpé. Le temps de remettre un peu de sens dans nos vies, de continuer nos autres engagements militants, de souffler et de reprendre des forces pour différents projets. Reprendre pied, retrouver notre propre temporalité. Mais la répression revient toujours pour dicter sa marche : « toc toc, le procès, c’est pour bientôt ! ». Et là, de nouveau, tout s’accélère. Encore une étape atroce qu’il faudra passer, pour que « justice soit rendue », c’est à dire encore un déversement de violences judiciaires à l’horizon, dans lequel il faudra affronter la froideur robotique de magistrats désincarnés vivant dans leur réalité propre.

« L’idée d’une Justice qui rend le mal pour le mal ne peut mener qu’au mépris de toute justice » nous dit Catherine Baker, ajoutons que celle rendant le mal pour le bien mène à la nécessité de son abolition. La CEDH venant d’autoriser officiellement l’application d’une loi mussolinienne à l’encontre de Vincenzo Vecchi, condamné à 10 ans de prison ferme pour avoir participé à une manifestation de 300 000 personnes… il y a 21 ans. Il n’y a plus rien à sauver de ces institutions.

DES NOUVELLES DE LIBRE FLOT

Après le combat de Libre Flot contre ses conditions de détention inhumaines et injustifiées, ce dernier avait été libéré in extremis « pour raison médicale », alors au bord du coma après 36 jours de grève de la faim. Il y avait eu, le 4 avril 2022, une forte mobilisation internationale en faveur de sa libération.

Après avoir passé plus d’une semaine en service de renutrition, il s’est vu incarcéré à domicile, sous dispositif ARSE (Assignation à Résidence sous Surveillance Électronique), défini comme « une mesure de sûreté destinée aux personnes dont la dangerosité est attestée ». Cela fait environ 6 mois maintenant. Cette mesure s’accompagne de beaucoup de contraintes: obligation de travail après un court « arrêt maladie » suite à sa sortie, un suivi judiciaire intense avec des enquêtes psychologiques d’ « évaluation de la radicalisation », interdiction de sortie hors temps de travail, et les jours non-travaillés, seulement deux pauvres heures autorisées. Cette oppression temporelle constante, la tyrannie des horaires à respecter sous peine d’être renvoyé au placard, constitue une source d’oppression permanente, comme le décrit parfaitement Kamel Daoudi.

Vous l’aurez compris, tout le panel répressif de « la prison à la maison » prolonge évidemment l’oppression constante de l’incarcération et de la surveillance et a pour but d’empêcher la personne de se reconstruire pleinement et de soigner les séquelles que peuvent laisser plusieurs mois de Quartier d’Isolement (QI), dont 37 jours de grève de la faim.

Après ces 16 mois d’absolu vide sensoriel, on ne peut qu’imaginer la désorientation du ressentir et la saturation d’informations lorsqu’on se met à redécouvrir les visages, les goûts, les textures, les sensations corporelles, les lumières, etc. C’est là tout le secret de la torture blanche, elle est invisible mais profonde.

Les séquelles de l’isolement restent omniprésentes : perte totale de prise sur le temps, douleurs nerveuses, pertes de mémoire, épuisement chronique, etc. ; mais Libre Flot a quand même repris du poil de la bête et retrouvé le sourire et les petits plaisirs de la vie dans le sud-ouest.

Ce 28 septembre prochain, le talentueux Jean-Marc Herbaut l’a convoqué pour le renouvellement de son maintien sous bracelet électronique. Le laissera-t-il dans ces conditions, toujours largement inéquitables vis-à-vis des autres inculpé.es ? Ou pire encore, révoquera-il sa libération « pour raison médicale » afin de le renvoyer au placard ? Restons vigilant.es ces prochains jours.

DES NOUVELLES DU 8/12

« L’humanité, l’intégrité d’un magistrat, voyez-vous, ce n’est pas dans les livres, les études et les statistiques qu’on peut s’en faire une idée ; c’est en le pratiquant en tant qu’inculpé. Croyez-vous qu’un juge avouera dans ses notes annuelles qu’il s’adresse aux prévenus comme à des chiens ? Le seul moyen de s’en apercevoir, c’est d’être justiciable soi-même. Tout le reste n’est que littérature. »

De la prison à la révolte, Serge Livrozet (1999)

 

Le 26 août dernier, Jean-Marc Herbaut met fin à l’information judiciaire dans le dossier du 8/12, Ce dossier ouvert par la DGSI sous le nom d’ « affaire punk à chien », puis renommé après les arrestations « contre [LIBRE FLOT] et autres », aura donc été alimenté par 932 jours d’une instruction très bornée.

Cette clôture est un soulagement, car cela met fin aux commissions rogatoires mandatées par le juge, qui permettaient à la DGSI d’user de « tous les moyens en sa disposition » pour harceler les mis.es en examen et leurs proches. C’est à dire que la surveillance ne sera désormais plus appuyée par la Justice.

Mais cela signifie aussi que le dossier est clos, laissant aux inculpé.es et leur Défense un délai de trois mois pour apporter les derniers éléments (demandes d’actes ou observations). Au bout de ce délai donc, le 26 novembre prochain, ce sera au tour du PNAT de faire ses « réquisitions », c’est à dire d’exiger quelle Cour devra juger nos ami.es et camarades.

Une fois les réquisitions du Parquet déposées, il restera enfin un mois de délai à la Défense pour émettre ses dernières observations. Et enfin : l’illustre magistrat Jean-Marc Herbaut, qui a démontré, par son acharnement personnel contre Libre Flot, être devenu trop sénile pour exercer son travail, décidera qui aura l’honneur de châtier les inculpé.es au nom du peuple français.

Car les accusations n’ont pas changé, au contraire elles n’ont eu de cesse d’être martelées par le juge d’instruction, la DGSI et le PNAT, ne tenant aucunement compte de la paroles des mis.es en examen, de leurs proches et de leur défense. Toujours les même névroses policières, répétées sans discernement. Un « groupe » qui n’en est pas un (les expertises numériques et témoignages le confirment), « destiné à commettre des actions violentes à l’encontre notamment de membres des forces de l’ordre et de militaires » (nié par les mis.es en examen et des témoins), « en se concertant dans ce but avec des membres de divers groupuscules ayant les mêmes objectifs en France et à l’étranger » (hallucinant, on ne sait même pas lesquels), qui organiserait des « entraînements para-militaires » (deux après-midi de Airsof, pas avec les même personnes, dans des spots différents) et qui fabriquerait des « engins explosifs » (quantités infimes de produits ménagers, pour s’amuser et par curiosité).

Qu’il ait été impossible de prouver « l’entente établie », « la concertation dans le but de », « l’intention de » et donc en fait un quelconque « projet », ne semble pas déranger l’ajustice. Tous ces vides sont automatiquement comblés par la présomption de culpabilité. Si par exemple l’analyse des téléphones montrent que la plupart des protagonistes du groupe n’étaient pas en lien, c’est qu’ils devaient forcément communiquer par des applications sécurisées. Et par conséquent, c’est qu’ils avaient bien un projet commun. Ou si une brochure sur la guérilla a été retrouvée parmi des milliers d’autres fichiers, eux mêmes répartis parmi des dizaines de clés usb, disques durs, ordinateurs (etc.), c’est qu’elle a bien été lue par le mis en examen, et s’il l’a lu, c’est qu’il doit bien adhérer à l’action violente, et s’il y adhère, c’est la preuve que tous ces agissements dans sa vie convergent vers ce but ! Les abîmes infinies de la police d’anticipation, mais dans la tête d’un juge d’instruction.

C’est donc aussi la perspective d’une réincarcération dans quelques mois qui refait surface, pour la plupart des inculpé.es, puisque la volonté de punir a depuis longtemps pris le dessus sur la rationalité, comme le constate l’anthropologue Didier Fassin dans son dernier ouvrage, Punir, une passion contemporaine (2020). Il n’y a rien à attendre d’autre qu’un naufrage éthique d’une justice militarisée. L’antiterrorisme est une guerre qui n’a pas fini de produire ses « ennemis ».

Dans tous les cas, ce procès continuera de n’être rien de moins qu’un élément du délire sécuritaire actuel et du virage militaire de tous les appareils d’État. De la vengeance en pâture pour cochons patriotes. Mais nous ne sommes pas vaincu.es, nous apporterons la Vérité dans leurs simulacres.

LE TERRORISME EST UNE MATIÈRE ÉLASTIQUE

« La notion de terrorisme est si largement définie dans le règlement qu’elle pourra servir à justifier la censure de discours radicaux ou de toute expression favorable à des actions politiques offensives ou violentes – tels que le sabotage ou le blocage d’infrastructures. »

La Quadrature du Net

 

Il semble que la notion de « terrorisme », soit devenu le mot-valise des réactionnaires pour criminaliser et déshumaniser leurs opposant.es. Dans un contexte de désastre climatique imminent, le mouvement écologiste est particulièrement visé par cette assimilation au terrorisme.

Pendant la sécheresse de cet été, le président de la Chambre d’Agriculture de la Haute-Vienne, Bertrand Venteau affirmait impunément au micro de France 3 : « c’est pas des écologistes, c’est des terroristes » au sujet des opposant.es à la construction sauvage de barrages sur les cours d’eau.

C’est aussi la rhétorique employée par le Conseil de l’Agriculture Finistérienne, qui a qualifié de « terrorisme vert » l’action du Collectif contre les Fermes-Usines, militant contre l’élevage industriel (responsable de plus de 23 % des émissions de CO2 à l’échelle mondiale).

Outre l’évident conflit entre les partisan.es d’un changement radical dans les modes de production agricole et les défenseur.euses de l’agro-industrie, c’est aussi le signe d’une militarisation latente du monde de l’agriculture qui s’exprime. Le collectif Ni Guerre Ni état de Guerre analysait en mai 2021 les nouvelles stratégies de Défense ainsi :

« La théorie développée depuis plusieurs années est la suivante : l’Armée ne sera pas capable de faire face seule aux crises qui s’annoncent. Il faut organiser la capacité de mobilisation de la nation tout entière, pour qu’elle réponde par son action aux objectifs stratégiques fixées.

Une telle orientation suppose une coopération de l’Armée avec les institutions civiles. Celle avec le Ministère de l’Éducation nationale (ainsi que celui de l’Agriculture) est déjà engagée depuis plusieurs années, avec cinq protocoles organisant la collaboration avec le ministère de la Défense. »

Il ne fait aucun doute que dans la « collaboration avec la Défense » du monde agro-industriel, la désignation des « écolos » comme ennemis a pour objectif de légitimer l’émergence de milices anti-zadistes comme on a pu l’observer à la ZAD du Carnet par exemple.

Mais l’élasticité du concept ne s’arrête pas à l’usage maladif du terme, il s’étend en fait à la diversité de réalités visées par les dispositifs antiterroristes. De l’individu commettant un massacre de civils à l’opposant au déploiement de la 5G qui brûle une antenne. Outre les arrestations du 8/12, on a vu ces derniers mois les moyens de l’antiterrorisme être déployés contre des camarades soupçonné.es de sabotages.

Le 10 avril 2020, une antenne-relais prend feu dans le Jura, sur le Mont Poupet. Le jour même, le Groupe Anti-Terroriste de la Brigade Criminelle de Dijon sera sur l’affaire, et le procureur demandera l’appui du Bureau de Lutte Anti-Terroriste (BLAT) de la Gendarmerie, ce qui aboutira à l’arrestation et l’emprisonnement de Boris.

Le 15 juin 2021, la Sous Direction Anti-Terroriste (SDAT) effectue une grosse opération antiterroriste débouchant sur l’arrestation de 7 personnes dans le Limousin pour l’incendie d’antennes et de cars, résultant sur 3 mises en examen pour « destructions matérielles en bande organisée portant atteinte aux intérêts de la Nation ».

Le 11 juin 2022, les moyens de la Sous Direction Anti-Terroriste (SDAT) sont encore mobilisés pour arrêter un camarade anarchiste, Ivan. Il sera finalement mis en examen et incarcéré pour six incendies de véhicules.

Cette tendance à élargir la répression antiterroriste se confirme dans la loi de censure automatisée votée cet été, permettant la suppression en une heure d’un contenu jugé « à caractère terroriste » par la police. La Quadrature du Net met elle aussi en garde : « la notion de terrorisme est si largement définie dans le règlement qu’elle pourra servir à justifier la censure de discours radicaux ou de toute expression favorable à des actions politiques offensives ou violentes – tels que le sabotage ou le blocage d’infrastructures. » Le conseil constitutionnel doit encore évaluer la loi pour qu’elle soit appliquée.

La meilleure réponse restera toujours de multiplier les gestes que l’État souhaite réprimer. Le collectif Écran Total a lancé un appel à soutenir les personnes en lutte contre la numérisation des territoires.

Dans ce contexte de déploiement de l’antiterrorisme, il n’est absolument pas anodin que Laurent Nunez (ancien directeur de la DGSI et Coordinateur National du Renseignement et de la Lutte contre le Terrorisme) ait été placé à la tête de la Préfecture de Paris. Spécialiste du Renseignement et surtout de l’Anticipation, nous allons voir ses talents antiterroristes à l’œuvre, à n’en pas douter, pour expérimenter massivement des techniques de répression préventives. Sa mission médiatique étant la sécurisation des JO 2024, on peut être sûr.es que le Renseignement est déjà entrain de tisser sa toile contre les opposant.es à ce Saccage2024, promettant gentrification forcée, bétonisation, et déploiement de technologies de surveillance dans l’espace public.

Dans une conférence récente donnée au CNAM, intitulée « Information, anticipation, renseignement », Laurent Nunez déclarait à propos des Gilets Jaunes : « Le Renseignement territorial avait su détecter et documenter une montée des mécontentements autour de thématiques revendicatives. Mais le mouvement en tant que tel fut imprévisible car il s’est cristallisé spontanément, sans organisateur, ni direction précise. »

La frontière devient très ténue, entre la surveillance antiterroriste et la volonté de tuer dans l’œuf toute contestation de l’ordre dominant. Mais c’est là le cœur de la fonction de Police, l’« administration veillant au bon ordre ». Le Renseignement politique a donc de beaux jours devant lui, avec une Délégation parlementaire au Renseignement dirigée par Renaissance et le Rassemblement National en prime.

QUELQUES BRÈVES ANTITERRORISTES A L’INTERNATIONAL

On ne le répétera jamais assez : en temps de guerre, toute opposition devient « ennemi intérieur » et doit être neutralisée. Là réside le but final de l’antiterrorisme.

Turquie.

Nous avions déjà souligné dans des articles précédents l’instrumentalisation par la Turquie (deuxième armée de l’OTAN) du « terrorisme » à des fins génocidaire et l’impact que cela avait sur les politiques antiterroristes françaises.

Cette dynamique s’accentue encore actuellement. Malgré la campagne européenne pour dé-lister le PKK des organisations terroristes, Erdogan a tiré profit de la guerre en Ukraine pour déclencher de nouvelles attaques meurtrières sur le kurdistan. Il a aussi imposé à la Suède et la Finlande, qualifiées « d’auberge aux terroristes du PKK », qu’elles déportent des réfugié.es kurdes vers la Turquie pour qu’iels y soient torturé.es et emprisonné.es, sans quoi il menace de bloquer leur adhésion à l’OTAN. L’Organisation a également réaffirmé que la guerre mondiale contre « le terrorisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations » était une priorité, mais aussi que « l’immigration clandestine » serait une « menace » à la « souveraineté et à l’intégrité territoriale » de ses États membres, justifiant directement la militarisation des frontières et indirectement les massacres d’exilé.es comme celui de Melilla en juin dernier.

Or s’il y a un État pour lequel le « terrorisme » a de nombreuses manifestations, c’est bien la Turquie. En témoigne la nouvelle condamnation, par la Cour Suprême de Turquie, de la sociologue féministe et antimilitariste Pinar Selek à la prison à perpétuité, après avoir été totalement acquittée 4 fois car il a été démontré par plusieurs experts que l’« attentat » dont on l’accuse était une fuite de gaz.

Mais la justice antiterroriste française collabore avec le régime fasciste turc depuis des décennies. Nous avons pu constater à plusieurs reprises dans le dossier du 8/12 la tentative – tantôt de la DGSI, tantôt du juge d’instruction – d’agiter le spectre du PKK pour enfoncer encore la présomption de culpabilité. Jean-Marc Herbaut lui-même, fort de son endoctrinement, décrivait la journaliste et artiste kurde Zehra Dogan, reconnue internationalement, comme « militante du PKK » ?! Hallucinant et consternant à la fois. L’élément à charge ? Une brochure intitulée « Un jour nous vaincrons » (à retrouver sur notre blog). Si le PKK n’était pas inscrit sur la liste des organisations terroristes de l’UE, cela prêterait à rire, mais dans le langage judiciaire français, affirmer cela équivaut à dire « c’est une terroriste ».

Russie.

L’usage intensif de l’outil antiterroriste par la Russie n’est pas récent, il s’applique tout particulièrement depuis des décennies contre les minorités Ouzbek et les anarchistes. Cependant depuis l’intensification de la guerre inter-impérialiste entre la Russie et l’OTAN, se matérialisant dans la guerre en Ukraine, la répression s’est abattue de manière très féroce sur les activistes anti-guerre et anti-fascistes, se matérialisant en centaines d’années de prison.

Vladimir Sergeev a été arrêté lors d’une action anti-guerre le 6 mars 2022. Des cocktails Molotov ont été découverts dans son sac à dos. Lors de son arrestation, Vladimir a fait une tentative de suicide. Il s’est rétabli après avoir passé plusieurs jours dans le coma. Il est été accusé de « préparation au terrorisme » et pourrait être condamné à une peine de 10 ans de prison. Il se trouve actuellement dans la tristement célèbre prison de Butyrka, à Moscou.

Anton Zhuchkov est un ami de Vladimir Sergeev, ils ont été arrêtés ensemble lors de l’action anti-guerre du 6 mars. Lors de son arrestation, Anton a fait aussi fait une tentative de suicide et s’est rétabli après avoir passé plusieurs jours dans le coma. Il est aussi accusé de  « préparation au terrorisme » et pourrait être condamné à une peine de 10 ans de prison. Anton n’a pas de famille, et il a grandi dans des institutions.

Suivez les actualités de l’Anarchist Black Cross Moscow pour savoir comment les soutenir.

Biélorussie.

La Biélorussie a introduit la peine de mort pour « tentative d’acte de terrorisme », selon un décret publié mercredi 18 mai. Jusqu’à présent seuls ceux qui avaient commis un tel acte étaient passibles d’exécution. La cible exacte de cette mesure reste peu claire (à moins qu’elle ne vise les oppositions tous azimuts). Depuis le vaste mouvement de contestation de 2020 contre la réélection de Loukachenko, de nombreux opposants ont été inculpés et arrêtés pour tentative ou préparation d’acte de terrorisme. En mars 2021, le parquet biélorusse avait annoncé que la cheffe de l’opposition pro-occidentale, Svetlana Tikhanovskaïa, en exil depuis 2020, faisait l’objet d’une enquête pour « préparation d’acte de terrorisme en bande organisée ». La scène anarchiste a aussi été ciblée à de nombreuses reprises par les forces de sécurité biélorusses (voir ici ou ici).  Enfin, plusieurs actes de sabotages ont ciblé le trafic militaire russe passant par la Biélorussie et se dirigeant l’Ukraine: la nouvelle loi pourraient en viser les auteurs de ces sabotages, dont plusieurs ont déjà été capturés.

Secours Rouge a effectué un bilan de la répression suite au soulèvement populaire.

L’Anarchist Black Cross Belarus organise l’information et le soutien aux prisonniers anti-fascistes et anarchistes. De nombreuses campagnes internationales de soutien ont été organisées.

Israël.

Sept ONG palestiniennes ont été qualifiées d’organisations terroristes par le régime d’apartheid israélien ; et subi une vague de répression intense : arrestation de leurs membres, fermeture des locaux, saisies du matériel, etc.

Alors qu’Israël intensifie les attaques ciblant leur travail, un groupe de plus de 150 organisations palestiniennes, régionales et internationales exprime sa solidarité complète avec les sept grandes organisations désignées de la société civile palestinienne : l’association Addameer pour le soutien aux prisonniers et les droits humains, Al-Haq (Le Droit au service de l’homme), le Centre Bisan pour la recherche et le développement, Defense for Children International Palestine (Défense des enfants International – Palestine, DCI-P), les Health Work Committees (HWC), l’Union des comités de travailleurs agricoles (UAWC) et l’Union des comités de femmes palestiniennes (UPWC).

Le matin du 18 août 2022, les forces d’occupation israéliennes (IOF) ont mené une descente dans les bureaux de ces sept organisations palestiniennes et en ont bouclé les entrées. Elles ont confisqué des documents et du matériel et ont détruit des objets. Des ordonnances militaires ont été fixées sur les portes des organisations, imposant la fermeture des bureaux en application de l’article 319 du Règlement d’Urgence de 1945. Cet évènement survient à la suite de la désignation par Benny Gantz, ministre israélien de la défense, le 19 octobre 2021, de six importantes organisations de la société civile palestinienne comme organisations terroristes aux termes de la Loi israélienne antiterroriste (2016), étendue à la Cisjordanie le 3 novembre 2021 par une ordonnance militaire qui mettait hors la loi ces mêmes organisations.

Myanmar.

Après le coup d’État militaire de la junte birmane le 1er février 2022, de nombreux membres de la Ligue Nationale pour la Démocratie ont participé à la fondation d’un « gouvernement d’unité nationale ». En mai 2022, ce dernier annonce la création d’une « force de défense » pour lutter contre la dictature militaire. Le régime a immédiatement annoncé à la télévision que cette « force de défense du peuple » ainsi qu’un groupe intitulé Comité représentatif Pyidaungsu Hluttaw (CRPH), le terme birman signifiant parlement, faisaient désormais partie de la liste des «organisations terroristes». Cette nouvelle classification en « organisation terroriste » signifie que quiconque communiquerait avec ses membres, y compris les journalistes, pourrait être poursuivi dans le cadre des lois antiterroristes.

Philippines.

Le 3 juillet 2020, le gouvernement des Philippines a introduit la « Anti-Terrorism Act ». La loi prévoit l’incarcération à vie pour la commission ou l’intention de commettre – des actes qui provoquent ou créent « l’intimidation du public, la promotion de messages de peur, l’intimidation du gouvernement, la destruction ou la déstabilisation de l’économie, de la politique et de la société, pour créer une urgence publique et nuire à la sécurité publique ». Selon cette définition, les grèves/piquets de grève des travailleurs ou les actions de protestation publique pourraient être interprétés comme du « terrorisme ». Vous pouvez également commettre du terrorisme « au moyen de discours, de proclamations, d’écrits, d’emblèmes, de bannières ou d’autres représentations de ceux-ci ». Cela signifie-t-il parler lors d’un rassemblement ou donner une présentation à une classe ou tenir une pancarte ou afficher un mème ou une vidéo? Qui sait, parce qu’en vertu de ce nouveau projet de loi, le gouvernement a le pouvoir discrétionnaire d’interpréter lui-même le « terrorisme ».

Un gouvernement qui, au nom de la lutte contre la drogue, a lancé une vaste opération de purge sociale ayant fait plus de 30 000 exécutions extra-judiciaires. Des assassinats ont également été perpétrés contre des gauchistes, des dissidents, des leaders paysans, des leaders sociaux et d’autres militants. En 2018 des anarchistes de Food Not Bombs ont été abattus et incarcérés.

 

La France ne fait aucunement exception dans ce tableau mondial glauque. Avec un des complexes militaro-industriels des plus puissant du monde et une des polices les plus armées, l’État français effectue un lobbying sécuritaire au niveau mondial et représente une menace pour grand nombre de peuples. Le 22 janvier 2021, le Traité Interdiction des Armes Nucléaires (TIAN) a été ratifié par un 50e État et est donc entré en vigueur. Il a été signé par 122 pays, et évidemment, aucun des pays détenant cette arme (dont la France), maintenant illégale, ne l’a signé.

Cet État inique dans lequel nous vivons est une menace pour l’humanité entière. Elle fait partie de cette petite clique d’État terroristes, surfant sur les génocides et dictatures pour assurer ses « intérêts », qui ne sont pas les nôtres. Un État qui rase des villes entières au nom de « l’antiterrorisme », qui maintient des dictatures au pouvoir au nom de « l’antiterrorisme », qui introduit la surveillance de masse et la censure algorithmique au nom de « l’antiterrorisme ». Si la Justice existait dans ce pays, nous aurions déjà mi hors d’état de nuire ce business de la mort, fleuron de l’industrie française. Mais ces terroristes là se pavanent dans les salons Milipol et font des courbettes aux dictatures du monde entier.

Les Lois ne sont pas faites pour lutter contre la violence réelle, mais au contraire pour les renforcer. Le système pénal français est peut-être le premier employeur de néo-nazis : la police aux frontières, l’administration pénitentiaire et la police nationale oppriment chaque jour des centaines de milliers de corps racisés, et chaque année en tuent des centaines. Là réside la terreur réelle. L’essor d’un mouvement antimilitariste large et puissant est une urgence. Du traitement colonial des « quartiers » aux « lois sécuritaires », de l’OTAN à la vente d’arme, de la chasse à « l’assistanat » jusqu’aux constructions de prisons, le spectre de la guerre est omniprésent.

Libre Flot a mis fin à sa grève et est libéré « pour raison médicale ».

Il y a des jours qui paraissent une éternité pesante.

Ce lundi 4 avril, Libre Flot a fait le choix du printemps, après 36 jours de refus de s’alimenter. Il nous transmettait alors ce communiqué, pendant que des actions de solidarité s’organisaient de Lisbonne à Helsinki, de Thessalonique à Lille.

« Alors que ces presque 16 mois de détention en isolement m’ont laissé beaucoup plus de séquelles à la fois physiques mais surtout mentales et psychologiques
que 10 mois de guerre en Syrie,

Alors même que j’ai survécu à la libération de Raqqa,
face aux troupes de Daesh défendant bec et ongles
la capitale de leur califat,

Je reste estomaqué, non seulement de la censure qui est faite autour de ma situation, mais surtout devant le silence vis-à-vis de ma légitime et raisonnable requête, de la part du gouvernement français, du Parquet National Anti-Terroriste, du juge d’instruction Jean-Marc Herbaut,
démontrant ainsi leur choix de me laisser mourrir!

Pourtant en ce jour d’anniversaire, après 36 jours de grève de la faim, au moment où mon état de santé devient plus hasardeux que jamais, je fais le choix de la vie comme une renaissance, une nouvelle vie qu’accompagne ce printemps et tourne le dos à un potentiel dénouement fatal.
Ce 4 avril 2022, à 18h, j’ai décidé de me réalimenter.

Mais rien ne s’achève maintenant, je demeure enfermé, enterré vivant et plus que jamais, j’espère votre soutien
et appelle à la solidarité.

Je réitère que je ne demande qu’à être traité comme tou.tes mes co-inculpé.es, à savoir être mis en liberté le temps de pouvoir démontrer le côté calomnieux de cette honteuse accusation terroriste qui ne tient pas la route.

Salutations et respect,
Libre Flot. »

Dans le même temps était arraché du bout des doigts à l’Instruction une libération « pour raison médicale », donc provisoire et tout aussi révocable qu’une mesure d’isolement l’est, espérons que cela dure plus de 16 mois cette fois.

Le moment est à la joie et au soulagement pour les proches,et au renouveau pour Libre Flot. Il est très fatigué et on ne sait pas combien de semaines durera l’hospitalisation, mais il a commencé à se réalimenter très progressivement. Des soins de rééducation vont lui être donnés aussi. Il nous transmet ce message ce soir :

« Aujourd’hui, le 7 avril 2022, j’ai été remis en liberté, sous vracelet électronique,
pour raisons médicales…

J’ai donc été transféré dans un établissement hospitalier, libre, afin de profiter de tous les soins nécessaires en conséquence de cette longue période d’inanition. Je vais pouvoir me focaliser sur la reconstruction de mon corps, mon intellect et ma psyché.

C’est une excellente nouvelle pour moi, bien que le chemin qu’il reste à parcourir pour faire voler en éclat la mascarade de l’accusation terroriste, connue sous le nom d’affaire du 8.12
demeure probablement longue.

Mais je ne vous oublie pas et je tiens à remercier du plus profond de mon coeur toustes les personnes, collectifs et organisations m’ayant soutenu et ayant propagé l’information.

Je n’ai plus les mots pour exprimer ma gratitude!

Merci encore,

BERXWEDAN JIYAN E!

Libre Flot. »

 

En tant que comité de soutien, nous souhaitons aussi remercier les camarades qui ont vécu cette grève avec nous, et qui ont élevé leur voix contre l’antiterrorisme français. Nous avons visibilisé l’ignominie de cette affaire du 8 décembre, dénoncé la criminalisation historique des kurdes et de leurs soutiens, réappris l’importance de rompre l’isolement des frontières et des murs. On n’oublie pas.

« La guerre produit des dictatures comme les générations vivantes n’en ont jamais vu » avertissent les socialistes et communistes russes contre la guerre. Ce n’est qu’un début.
 
Pour que le monde ne devienne pas une prison, ABOLITION!
Pour la vie, REVOLUTION!