[LundiAM] De Pasqua à Darmanin, l’éternel retour de la théorie de la Mouvance

Permanence et évolution des récits fondateurs de la police politique française, 1986-2023

[Cet article est basé sur les PV de la DGSI sur l’ultragauche (révélées par Iaata.info), utilisés dans l’Affaire du 8 Décembre, dont le procès se tiendra du 3 au 27 octobre.]

Il n’aura échappé à personne que, depuis que M. Darmanin est premier flic de France, il s’efforce de surpasser ses prédécesseurs dans la fabrication d’un Ennemi Intérieur de sa convenance, qu’il a baptisé « l’ultragauche », terme qui, négligeant toute définition ancrée dans la réalité socio-historique.

L’appellation a pour vocation de diaboliser et criminaliser non seulement des pratiques politiques, mais aussi les tentatives de développer des formes de vie résistant aux logiques mortifères du capitalisme tardif. Dans la course au placement le plus près possible de l’ultradroite qui caractérise les manœuvres pré-électorales des politiciens de droite, la stigmatisation de l’ultragauche sert de bannière à une offensive réactionnaire multiforme, qui se traduit aussi bien par la suppression de subventions à tout ce qui, dans l’imaginaire préfectoral, peut être associé au vocable maudit, que par des manœuvres médiatico-policières à grande échelle. C’est dans ce cadre qu’est annoncée la venue de Darmanin « avant fin septembre » sur le Plateau de Millevaches où il devrait parler « effectifs de sécurité et actions contre l’ultragauche. »

C’est dans le même cadre que doit s’ouvrir le 8 septembre, à Niort, un procès contre 8 personnes accusées d’avoir organisé les manifestations de Sainte Soline  : trois membres des soulèvements de la terre, trois syndicalistes (Solidaires, CGT, Confédération paysanne), un membre de Bassines Non Merci. Et c’est bien toujours dans le même cadre que 7 personnes arrêtées le 8 décembre 2020 passeront en procès du 3 au 27 octobre 2023, pour répondre d’un fantomatique « délit d’association de malfaiteurs terroristes ». Mais dans ces deux affaires, si, comme on le verra plus loin, la matrice idéologique des poursuites est la même, la différence de situation saute aux yeux. Dans le cas des Soulèvements, malgré la mobilisation des médias de droite sur la « violence » des manifestants de Sainte Soline et la tentative d’imposer l’idée d’un « écoterrorisme », l’entreprise darmanienne patine notamment grâce au puissant mouvement de solidarité avec les Soulèvements et aux réticences du Conseil d’Etat face au décret de dissolution : pour le procès lui-même, la Secrétaire générale de la CGT annonce qu’elle fera le déplacement pour soutenir les inculpés. Il en va tout autrement dans la deuxième affaire. Dans le cas du 8 décembre, on peut lire un bon résumé de l’affaire ici. Quiconque approche d’un peu près le dossier se rend compte de la faiblesse de l’accusation et de l’importance des enjeux qu’elle charrie, pour tout le monde. Alors, pourquoi la solidarité dont les inculpés du 8 décembre ont bénéficié a-t-elle été très loin d’atteindre l’ampleur de celle qui s’est manifestée autour des inculpés des Soulèvements ? La réponse, paradoxale, est peut-être qu’à la différence de ces derniers, poursuivis pour leur participation revendiquée à un mouvement dans lequel des milliers de personnes se reconnaissent, les interpellé.e.s du 8 décembre n’ont à peu près rien fait. Comme le dit très bien une mise en examen, « comme dans notre histoire, il n’y a pas de faits matériels, les moindres propos relevés font office de preuve et deviennent presque un élément matériel à charge ». Faute d’éléments matériels probants, toute l’accusation repose sur un récit, celui de la DGSI, repris et ânonné ensuite, successivement, par le juge d’instruction et par le Parquet national antiterroriste.

Une littérature engagée, les notes de synthèse

Autant que le tir à la cible, l’art du récit fait partie des compétences indispensables au policier contemporain : on a pu le vérifier a contrario, en bas de l’échelle hiérarchique avec ces rapports de fonctionnaires s’efforçant de couvrir leurs violences derrière des rapports mal ficelés. On en a une illustration plus élaborée dans le dossier de l’affaire du 8 décembre avec les notes de synthèse de la DGSI datées du 13 juillet 2022 intitulées respectivement la « mouvance ultra-gauche » et « la violence et l’ultra-gauche », l’une et l’autre nous offrant rien moins qu’une fresque historique de l’ultragauche à partir des années 70. Aux talents du conteur policier, les magistrats se contentent souvent de substituer la virtuosité dans l’art du copier-coller, puisqu’ils sont la plupart du temps de simples porte-voix du récit des forces de l’ordre, ainsi que le montre la lecture du réquisitoire du Parquet national antiterroriste et l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction Jean-Marc Herbaut. OPJ et magistrats tiennent leur définition de l’objet de leurs préoccupations, dont l’existence justifie qu’on leur verse un salaire pour s’occuper de ça : « la frange de l’extrême-gauche non légaliste, qui rejette les partis et prône l’utilisation de la violence pour aboutir à la transformation de la société. » Voilà ce que c’est, selon eux, que l’ultra-gauche. A quoi vient s’ajouter cette précision, qui laisse perplexe : « elle trouve son origine chez les anarchistes italiens au 19e siècle » (Herbaut copiant l’OPJ). Cette pittoresque incursion dans l’Histoire évite bien sûr de signaler ce fait massif, à savoir que le recours à des formes d’illégalisme fait partie de la tradition du mouvement ouvrier, des négociations par l’émeute du XIXe siècle aux sabotages appuyant les grèves de 1947 et à 68, et de tous les mouvements populaires en général, et que ces illégalismes, cf les interventions de la FNSEA devant des préfectures, n’ont pas toujours entraîné la mobilisation de la rhétorique antiterroriste et des services du même nom. Il est vrai que le terme « violence » n’est pas défini, et qu’en particulier la distinction fondamentale entre violences sur les êtres vivants et violence sur les choses n’est jamais opérée. Ce qui permet de classer parmi les actions de l’ultragauche aussi bien la « multiplication des squats, des manifestations violentes ainsi que des dégradations de magasins ou de matériels urbains », que « l’occupation du plateau du Larzac, la grève des LIP, l’occupation de la rédaction du journal Libération en octobre 1977 » : population paysannes s’opposant à l’extension d’un camp militaire, ouvriers grévistes, lecteurs de Libération mécontents du traitement par « leur » journal de l’affaire Baader, tous ultragauche !

Cette indistinction dans une sorte de magma où jamais ne sauraient apparaître les réflexions politiques structurant les débats à l’intérieur des groupes et mouvements présente l’avantage d’établir une sorte de continuité fatale entre les squats, les occupations, le bris de vitrine et la création d’organisations clandestines pratiquant l’assassinat politique. C’est ce qu’on appelle la théorie de la Mouvance. Toutes les considérations socio-historiques qui s’étalent sur des dizaines de pages, de procès-verbaux de synthèse en « préambules sur la mouvance », n’ont, en cette affaire, qu’une fonction : combler le vide d’un dossier où aucune espèce de projet d’attentat et encore moins aucun début d’exécution n’a été mis en évidence.

La Mouvance dans tous ses états

Il y a une continuité indéniable de Pasqua à Darmanin. Le Corse qui se targuait de « terroriser les terroristes » a mis le pied à l’étrier à Sarkozy, dont Darmanin est le bébé politique, celui par lequel il compte sans doute esquiver la suite de ses ennuis judicaires. Il n’est donc pas abusif de remonter à l’époque où Pasqua, l’ancien du Service d’Action Civique et de Ricard, était à l’Intérieur.

En avril 1986, à la suite d’un attentat manqué contre le vice-président du Centre national du patronat français (ancêtre du Medef), revendiqué peu après par Action Directe, 53 personnes étaient interpellées, dont 6 étaient inculpées pour divers délits. Dès le départ les liens entre les inculpés et AD paraissaient difficiles à démontrer. Assez rapidement, policiers et magistrats reconnaîtraient qu’ils n’existaient pas mais les médias qui avaient proclamé à l’envi qu’un coup dur avait été porté à AD s’abstinrent de le signaler. Le Comité contre la paranoïa policière écrivait : « Une fois de plus la trilogie police- justice-médias fonctionne à plein. A grand renfort de constructions et de mensonges purs et simples, des journalistes tracent le portrait d’un milieu supposé servir de terreau au « terrorisme », l’image des attentats aveugles [perpétré par des services moyen-orientaux, note de 2023] servant à diaboliser un « milieu ». Après cela, on peut continuer à perquisitionner, interpeller à tour de bras, (.…) Un gouvernement en quête de « différence » aura réussi à vendre à l’opinion son image d’anti-laxisme. Au passage, on voudrait en profiter pour terroriser les quelques centaines de personnes qui, en France, ne se reconnaissant toujours pas dans le grand consensus libéral. »

Sachant que, depuis les années 80, l’opposition au modèle ultralibéral a vu ses rangs se gonfler au point qu’il ne faut plus parler de quelques centaines mais de millions de personnes, on notera plus de similitudes que de dissemblances dans les situations, avec notamment la permanence, dans le discours gouvernemental, de narrations théorisées et vendues depuis quarante ans par d’indéracinables « spécialistes », comme les indéboulonnables Alain Bauer et Xavier Raufer.

En 1989, dans L’antiterrorisme en France ou la terreur intégrée (La Découverte), je citais une interview de Raufer à la revue L’Histoire dans laquelle il parlait de la nécessité de « calmer certains intellectuels qui peuvent parfois se laisser aller à fournir des justifications à des actes violents » et expliquait qu’il fallait cerner la « mouvance », le « vivier » d’Action Directe, « pour la pénétrer et la rendre progressivement impraticable au groupe clandestin. » Je commentais en ces termes : « On appréciera (…) la phrase concernant les intellectuels, où la menace sourd de la litote. Quand on sait qu’à l’époque où est parue cette interview, la théorie du « vivier » et de la « mouvance » a été utilisée par Ch. Pasqua pour une série de gesticulations policières qui se sont traduites par de nombreux abus fort peu respectueux des « règles de l’Etat de droit », et par des constructions médiatiques passablement dangereuses pour les individus qu’elles mettaient en cause, on peut douter de la « mesure » du personnage. » On pouvait d’autant plus en douter que les accointances de Raufer avec l’extrême-droite ne se limitaient pas à une jeunesse dans les rangs d’Occident, puisqu’ en 1982, il dédiait encore son livre Terrorisme, maintenant la France ? à un ancien thuriféraire du nazisme, Claude Harmel.

S’il y a beaucoup de similitudes entre la théorie de la mouvance telle qu’elle fonctionnait dans les années 80 et telle qu’elle est utilisée aujourd’hui, il y a tout de même, dans la pratique réelle, une différence de taille, un gigantesque détail qui change tout : il n’existe pas dans la France des années 2020 une organisation qui pratique l’assassinat politique – et c’est heureux. C’est un point qui n’a pas été assez relevé, et qui signale pourtant la maturité politique des mouvements d’action directe contre la domination capitaliste. En dépit de la férocité toujours plus grande de la répression contre les débordements hors des parcours balisés de la vieille politique, malgré l’accumulation des raisons d’éprouver une colère incoercible contre la flicaille assassine et éborgneuse et contre les politiciens qui la servent et s’en servent, tout se passe comme si la leçon avait été tirée des années dites « de plomb » : le terrain de l’affrontement militaire n’est pas celui de la transformation sociale. Les Etats seront toujours mieux armés que nous pour faire la guerre. Des débordements de manifs aux Zad, des gilets jaunes aux Soulèvements, et même jusqu’aux révoltes de juillet où personne n’a essayé de tuer des flics, l’ingéniosité avec laquelle les rebelles évitent le piège des pratiques meurtrières est d’autant plus remarquable qu’en face, on utilise des « armes à létalité réduites » qui ne cessent de tuer.

Le retour du décèlement précoce

Contre cette intelligence collective, la nouvelle mouture de la théorie de la Mouvance tente un retournement logique. Il ne s’agit plus de montrer qu’il existerait un « vivier » d’une organisation existante, mais la « mouvance » d’une organisation à venir. L’insistance de policiers et magistrats sur l’histoire racontée à leur manière – c’est-à-dire en partant des prémisses supposées d’AD et en s’étendant longuement sur l’histoire de cette organisation combattante sert à ça : mettre l’accent sur l’organisation « terroriste » comme devenir inévitable des mouvements présents. Ici intervient une mutation décisive de la théorie de la Mouvance introduire par les Dupont et Dupond de l’antiterrorismes : la notion de « décèlement précoce ». Dans leur livre paru en 2009, La Face noire de la mondialisation, Raufer-Bauer expose leur trouvaille : il faut s’attaquer aux nouvelles menaces quand elles ne sont encore qu’un « bourgeon », et cela grâce au regard d’experts formés par eux. Anecdote significative racontée dans mon bouqin La Politique de la Peur (Le Seuil, 2011) : « Président du groupe de contrôle des fichiers de police et de gendarmerie, Bauer répond le 19 novembre 2009 à une interview de Libération à propos de deux nouveaux fichiers (pouvant intégrer des mineurs de 13 ans) créés par Hortefeux en prenant prétexte de 18 vitrines brisées à Rouen : « il s’agit de fichiers de renseignements sur des personnes qui n’ont pas encore commis d’actes répréhensibles mais qui sont susceptibles de le faire. »

« Ils n’ont rien fait mais ils étaient susceptibles de le faire » : c’est au nom d’un récit de ce genre que des gens qui, pendant un an, ont été suivis et écoutés sans qu’ils esquissent jamais le moindre projet d’attentat sont pourtant accusés d’en avoir nourri un. C’est avec cette histoire à la Minority Report, mais beaucoup moins passionnante que le film, qu’on essaie de donner une portée incriminante à de pseudo-indices tels que la présence d’arme de chasse dans des maisons, le jeu avec de gros pétards, l’utilisation de logiciels de chiffrements (comme vous en utilisez tous j’espère), et la participation d’un camarade au combat contre Daesh dans cette entité du Rojava pourtant protégée par l’aviation américaine et avec laquelle l’Etat français négocie le traitement des prisonniers daeshiens.

C’est au nom de ce récit que Libre Flot, le camarade en question, a subi seize mois de détention à l’isolement, et que d’autres ont été emprisonnés pendant de longs mois. C’est au nom de ce récit qu’aujourd’hui, au mépris de la vérité, Gérald Darmanin utilise l’exemple de l’affaire du 8 décembre pour invoquer le « danger de l’ultragauche » quand il est auditionné par le Sénat sur Sainte Soline ou interviewé par BFM.

Comme le disait pourtant la Commission nationale de contrôle des renseignements dans son 7e rapport d’activité 2022 : « les seules velléités proclamées, y compris dans des termes radicaux, de renverser les institutions en place, quand bien même elles seraient partagées au sein d’un groupe de personnes adhérant à la même idéologie, ne suffisent pas à elles seules à caractériser un risque d’atteinte à la forme républicaine des institutions au sens de la loi.Prise isolément, l’appartenance à une mouvance ou un groupuscule appelant de ses vœux un renversement des institutions, la participation à des manifestations contestataires, l’hostilité affichée envers les valeurs républicaines et l’État français, l’installation de formes communautaires « expérimentales » ne sont pas non plus, en elles-mêmes, suffisantes pour justifier qu’une technique de renseignement soit mise en œuvre sur le fondement de cette finalité. » Il est seulement dommage qu’à notre connaissance, les avis de la CNCR, dans la réalité pratique et quotidienne des enquêtes, compte pour du beurre, comme le démontre d’ailleurs le déroulé cette affaire.

C’est pourquoi il faudra suivre de près le déroulement du procès qui se tiendra du 3 au 27 octobre à Pars. Il s’agit de rien moins que de s’opposer à des pratiques policières et judiciaires qui peuvent concerner, à terme, quiconque voudrait penser et agir en dehors des clous du légalisme le plus étouffant. Chacun sait que ce monde n’échappera à la catastrophe qu’au prix d’un changement profond de société. Et aucune société n’a jamais été changée dans le strict respect de ses lois et règlements.

Serge Quadruppani

Antiterrorisme & Ultragauche: la gouvernance par la peur

Le 8 decembre 2020, plusieurs perquisitions en France ont mené à l’incarcération de 5 personnes pour association de malfaiteur à caractère terroriste. Il ne leur est rien reproché de précis, la terminologie même de l’accusation est floue, et pire que tout iels sont enfermé.es sur la base “de soupçons” de “vague projet d’action violente” visant à “déstabiliser les institutions et la démocratie”… Un fusil de chasse, des produits ménagers, et une maigre enquête de la DGSI suffisent pour inculper plusieurs personnes, et permettent au gouvernement et ses institutions de communiquer à propos d’une menace “d’ultragauche” dont on nous protègerait.

« Ultragauche », c’est le terme le plus effrayant utilisé dans le discours gouvernemental pour marginaliser les luttes de gauche dites autonomes, c’est-à-dire critiquant, refusant et échappant aux controle étatique afin de garantir leur indépendance. Historiquement les luttes autonomes ont bien un lien avec ce terme qui désigne un courant de démocratie directe du début du siècle, une pratique importante à l’autonomie des luttes sociales, mais le gouvernement l’utilise de manière à escamoter cette réfèrence et conserver la charge symbolique “extrémiste” liée au mot “Ultra”.

Cette communication annonce aussi la couleur avec la qualification “terroriste”. “Gouvernement par la terreur”, ou “utilisation de la violence pour parvenir à des fins politiques”, voilà la définition du “terrorisme” lorsqu’on interroge un moteur de recherche. Alors même qu’elle s’applique parfaitement à nos gouvernants, son utilisation permet l’amalgame entre des personnes aussi différentes que des écologistes pacifistes ou des musulmans et des réactionnaires meurtriers, tout en incitant à la peur qui précède toute forme de réflexion.

Pour rendre tangible la “menace” de la démocratie directe et de ses partisan.e.s aux yeux de l’opinion publique, les institutions n’ont rien trouvé de mieux qu’un jeune homme ayant combattu l’état islamique auprès des kurdes du rojava, un territoire se définissant comme un système démocratique fédéral laïque, antisexiste, et écologiste… La menace terroriste d’ultra gauche se résume ainsi à quelques liens entre des personnes, des soupçons , une expérience de combat antifasciste, et l’utilisation de moyens de communication préservant l’anonymat. Au même moment, un coup de filet à l’extrême-droite met à jour l’achat et la vente d’armes par d’ex-militaires appelant au putsh, qui récoltent une bien simple et complaisante accusation “d’association de malfaiteurs” sans aucune qualification terroriste, malgré la possession de plus de 200 armes et de tonnes de munitions…

Ce qui mène a se demander : Qui terrorise qui ? Car si le label “terroriste” associe directement ; défenseur.euse.s de la démocratie directe, de la solidarité, de la liberté et de l’équité ; aux tueurs réactionnaires de Daesh, tout en écartant des fascistes qui projettent pourtant d’attenter à l’aspect démocratique des institutions et à la vie d’autrui, c’est bien que son sens n’est pas de désigner une menace spécifique. Au contraire c’est un fourre-tout articulé autour de la notion “d’ennemi intérieur” dont ne font manifestement pas partie les composantes les plus directement nocives et menaçantes notamment par leur racisme, leur islamophobie, leur sexisme haineux.

Nous sommes donc surtout menacé.e.s par tout un tas de réactionnaires, d’orthodoxes, et de gestionnaires voulant décider à notre place et imposer des modes de vie contraignants, dont l’état et les gouvernements qui le représentent font partie. Car l’arrestation des inculpé.e.s du 8 décembre vient occuper l’espace médiatique de manière opportune, en accompagnant à la fois les propositions de lois sur le “séparatisme” et la “securité globale”, tout en attaquant les constestataires et la critique sociale que cet arsenal législatif a mobilisés. Cet agenda n’a rien d’hasardeux et il est évident que cette affaire sert de communication politico-policière afin de criminaliser et diviser les mouvements d’émancipation qui cherchent à garantir nos droits et libertés. Une vaine tentative d’associer les pratiques et revendications les plus émancipatrices à des actes de guerre sordides, quand ils en sont eux-mêmes coupables (comme lorsque l’armée française bombarde un mariage au Mali).

Quand l’État parle de menace terroriste, la menace terroriste c’est l’État !

Effrayer les administré.e.s, criminaliser les luttes sociales, et réprimer des individus sans autre prétexte que “des soupçons”, voilà le monde dans lequel vous vivez, régi à coup de matraque et de propagande médiatique.

Plus que jamais il est nécessaire de lutter contre les restrictions de nos libertés, le fichage de nos vies, la répression des mouvements sociaux, et pour un monde de solidarité et de partage débarassé de toutes oppressions !

Dans la rue, sur les réseaux, au travail, en famille, avec les ami.e.s, partout où c’est possible et c’est possible partout, luttez, protestez, organisez-vous, ne cédez pas à la peur!

Liberté pour les inculpé.e.s du 08/12!