Communiqué du collectif internationaliste Marseille Solidarité Kurdistan

Communiqué du collectif internationaliste Marseille Solidarité Kurdistan sur les arrestations et inculpations des camarades kurdes du 23 mars. Publié le 7 avril sur mars-infos.org.

STOP à la répression contre le mouvement kurde !
PAS de collaboration avec le fascisme de l’état turc !

Répression et attaques contre le mouvement kurde (et ses militant.e.s)…

Mardi 23 mars dernier, 10 personnes de la communauté kurde ont été interpellées et arrêtées par la brigade antiterroriste : 2 à Paris, 2 à Draguignan et 6 à Marseille. Leurs domiciles ont été violemment perquisitionnés, ainsi que le siège de l’association kurde à Marseille. Elles sont officiellement accusées de participation à une association de malfaiteurs, de financement d’une organisation terroriste et d’extorsion en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste. Il semblerait qu’une enquête, en cours depuis plusieurs mois soit à l’origine de ces arrestations.
Cette semaine, nous n’avions que très peu de nouvelles des camarades incarcéré.es : 3 ont été relâché.es, une personne sans contrôle judiciaire et deux sous assignation à résidence (une sous contrôle judiciaire simple, et une sous bracelet électronique). Elles ne peuvent ni être en contact avec certaines personnes ni sortir autour d’un certain périmètre (avec interdiction formelle de se rendre au Centre Démocratique Kurde de Marseille). Aujourd’hui, les sept personnes encore en détention sont réparties dans différentes prisons de haute sécurité dans les environs de Paris. Elles sont passées devant le JALD (juge administratif des libertés et de la détention) mais leurs demandes de sorties ont été refusées sous prétexte de risque de récidive. Elles vont donc rester en détention provisoire jusqu’à la date encore incertaine de leur procès, sachant que cela peut durer des mois. Au moins trois des personnes ont une santé fragile (leucémie, problèmes cardiaques…) et leur état n’est pas compatible avec une détention.
Il s’agit d’un des plus gros coups de filet de la police française dans les réseaux militants kurdes ces dix dernières années, et il intervient quelques jours après un échange téléphonique entre Macron et Erdogan et une rencontre de leurs 2 ministres des affaires étrangères, en plein Conseil Européen sur la géopolitique internationale.
La pression sur la communauté kurde est constante : la même semaine, près d’une centaine de personnes d’origine kurde ont été convoquées dans différents commissariats, partout en France. A Paris, la même semaine Vedat Bingol, ancien président du Conseil Démocratique Kurde a été convoqué pour outrage à Erdogan et propagande terroriste.

De plus, la répression en France sur les demandeurs et demandeuses d’asile ainsi que sur les réfugié.e.s kurdes s’accentue : en septembre 2020 Memet Yalçin a été renvoyé en Turquie alors qu’il était enregistré en tant que demandeur d’asile depuis plus de dix ans ; Huseyin, alors détenu en Centre de Rétention, écope de trois mois de prison pour ne pas avoir fait le test anticovid afin d’empêcher les autorités françaises de le livrer à la Turquie.
Ceux et celles qui ont le statut de réfugié.e.s politiques se retrouvent souvent menacées de ne pas voir reconduit leur titre de séjour après expiration, ou bien même de se le voir retirer, et ce malgré sa validité en cours.

Nous venons d’apprendre, ce samedi 3 avril, qu’un groupe de fascistes turcs, les Loups Gris (supposé être interdit en France) a attaqué le centre kurde à Lyon armés de barre de fer, saccageant tout sur leur passage et faisant 4 blessé-es.

Une collaboration entre l’état français (et les états européens) et l’état turc selon leurs intérêts géostratégiques

Encore une fois, les kurdes servent de monnaie d’échange aux tractations entre l’Europe et la Turquie dans le but d’améliorer les relations entre la France et Ankara.
C’est grave et ces arrestations soulèvent plusieurs points qu’il nous semble important de questionner.
La France accorde l’asile à des personnes venues se réfugier sur son territoire pour raisons politiques et fuir un régime totalitaire. Mais à la demande de ce même régime, pour apaiser ses relations diplomatiques et obtenir des intérêts géostratégiques, elle les arrête par la suite, au motif de leurs activités en faveur des droits humains dans leurs pays d’origine, qualifié de terrorisme.
Rappelons que la communauté continue de subir, en europe, des menaces et des attentats extra-nationaux orchestrés par les services de renseignement turcs (MIT), à l’instar de l’assassinat des trois femmes et militantes kurdes à Paris en 2013, dont les commanditaires, bien qu’identifiés, n’ont pas été inquiétés par la justice.

Par ailleurs, la France soutient et accompagne logistiquement les forces résistantes kurdes qui se battent sur le terrain contre l’État Islamique et ont en charge la gestion du camp où sont enfermés les détenus djihadistes français et leurs familles dans le Nord de la Syrie . D’un côté, l’état et son armée soutiennent les kurdes lorsqu’il s’agit de combattre le terrorisme islamique, de l’autre, et pour obtenir des faveurs d’Erdogan. Il les arrête et les emprisonne pour terrorisme. Ces arrestations de militant.es kurdes sur le sol français ne sont rien de moins qu’une trahison d’une ignoble hypocrisie. Pour asseoir ses intérêts, la France n’hésite pas à pactiser avec les dictateurs au mépris des droits humains et de ses engagements envers les kurdes.

Une répression pour anéantir un projet de société alternatif

Le triple féminicide de Sakine, Fidan et Leyla perpétré à Paris par un membre du MIT (service secret turc) n’est pas dû au hasard : il concerne trois militantes kurdes luttant pour le droit des femmes. Sakine a inspiré et a eu un rôle important dans le mouvement des femmes kurdes. L’objectif de l’état turc était d’anéantir le PKK et le projet émancipateur qui le caractérise. A savoir que le gouvernement turc multiplie les réformes patriarcales, défavorables aux femmes, et laisse impunis les crimes commis envers elles .

Si les femmes ont une place primordiale au sein des mouvements kurdes, le mouvement de la jeunesse a un rôle moteur de part sa force, ses capacités d’imagination, et l’espoir qu’elle porte en elle.
Ainsi, la répression contre les jeunes est forte : on notera notamment qu’au sein des nombreuses arrestations des membres de la communauté kurde du 23 mars, la moitié sont des jeunes de moins de trente ans.

A cela se rajoutent les interpellations et les arrestations d’internationalistes effectuées le 8 décembre dernier « neuf militant·e·s libertaires, écologistes, pro-Kurdes, féministes et anti-racistes ont été perquisitionné·e·s et arrêté·e·s par la DGSI. Après plusieurs jours de garde à vue, deux furent libéré·e·s, deux autres placés sous contrôle judiciaire et cinq placé·e·s en détention provisoire. » Ils et elles sont « sont accusé·e·s de « participation à une association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme ayant pour objet la préparation d’un ou plusieurs crimes d’atteintes aux personnes », tel que défini dans l’article 421-1 du code pénal.  » Les « lois antiterroristes » « servent aujourd’hui de base juridique pour traquer ceux qui ont voulu combattre le djihadisme en Syrie. Avoir pris les armes contre l’Organisation de l’État islamique devient un élément à charge pour la machine policière. »

En France, la répression que subissent les membres de la communauté kurde et les nombreuses arrestations des kurdes et internationalistes montrent non seulement la collaboration de l’état français avec l’état turc pour des intérêts géostratégiques, mais aussi la volonté d’écraser un projet politique alternatif – le confédéralisme démocratique – qui effraie les états capitalistes européens.

Liberté pour les camarades détenu.e.s en prison et dans les CRA !
Arrêt total des poursuites à leur encontre !
Retrait immédiat du PKK de la liste des organisations terroristes !
STOP à la collaboration française avec les états fascistes totalitaires !

Contact : internationaliste-marseille@protonmail.com

(nous tenterons de mettre à jour le plus régulièrement possible les nouvelles autour des situations des camarades incarcéré.e.s ainsi que les mobilisations en solidarité)

[Le Monde diplomatique] Combattre les djihadistes, un crime ?

Le Parlement français a adopté de nombreuses lois « antiterroristes » qui permettent de substituer le soupçon à la preuve. Comble de la perversité, ces textes servent aujourd’hui de base juridique pour traquer ceux qui ont voulu combattre le djihadisme en Syrie. Avoir pris les armes contre l’Organisation de l’État islamique devient un élément à charge pour la machine policière. Par Philippe BAQUÉ.

En ce 8 décembre 2020, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) procède à l’arrestation de six hommes et d’une femme en Dordogne, dans le Val-de-Marne et en Ille-et-Vilaine. Présentés comme des membres de l’« ultragauche » et soupçonnés de préparer des actions violentes en France, ils sont mis en examen pour « association de malfaiteurs terroriste », un crime passible de trente ans de prison. Certains médias reprennent une « source proche de l’enquête » affirmant que ces personnes avaient formé une cellule clandestine en vue de commettre des attentats contre les forces de l’ordre. Le Point titre : « Syrie, SDF, fiché S : l’inquiétant profil du chef du groupe d’ultragauche » (13 décembre 2020).

Mais les formules sensationnalistes ne suffisent pas à masquer la fragilité du dossier. Les éléments saisis lors des perquisitions consistent essentiellement en des produits pouvant certes entrer dans la fabrication d’explosifs, mais communs (eau oxygénée, acétone, acide chlorhydrique), un fusil de chasse, un pistolet factice Airsoft, un casque de CRS (compagnies républicaines de sécurité)… Aucun des éléments rendus publics à ce jour ne prouve des intentions coupables ou un projet précis de passage à l’acte. Le parquet antiterroriste n’a fait aucune communication, alors qu’il est coutumier de l’exercice, et le procureur chargé de l’enquête a refusé de répondre à nos questions.

Ce qui est principalement reproché au supposé « chef » du groupe : avoir combattu en Syrie contre l’Organisation de l’État islamique (OEI, ou Daech). Une fois de plus, la DGSI tente de criminaliser des militants pour leur engagement au sein des forces arabo-kurdes de Syrie, les Forces démocratiques syriennes (FDS), pourtant soutenues par la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)… Entre 2015 et 2019, une trentaine de jeunes Français seraient partis se battre au Rojava, selon un calcul des militants. Au total, on compterait quarante-sept volontaires internationaux (dont onze Américains, sept Britanniques, cinq Allemands et trois Français) parmi les treize mille combattants (principalement kurdes, mais aussi arabes, yézidis, syriaques, etc.) morts en défendant la région autonome. Parmi les volontaires venus de France se trouvaient d’anciens militaires ou des individus désirant essentiellement en découdre avec les djihadistes de l’OEI. Figuraient aussi une poignée de militants marxistes, libertaires ou antifascistes, proches ou non d’organisations de la gauche anticapitaliste, et voulant défendre le processus révolutionnaire en cours dans le nord de la Syrie (1). Dès leur retour en France, ces militants ont pratiquement tous été convoqués et surveillés par la DGSI.

Dans son récit (2), M. André Hébert apparaît publiquement sous un pseudonyme afin de préserver sa sécurité et de ne pas individualiser un combat collectif. Après deux séjours au Rojava, ce jeune militant marxiste est désormais, comme plusieurs de ses camarades, « fiché S », c’est-à-dire signalé dans le fichier des personnes surveillées comme représentant un potentiel danger d’atteinte à la sûreté de l’État. En décembre 2016, des policiers de la DGSI lui ont confisqué son passeport et sa

carte d’identité pour l’empêcher de quitter le territoire. Ils agissaient en vertu d’une loi dite « antiterroriste » adoptée en 2014 pour empêcher de jeunes Français de rejoindre les rangs des djihadistes (3).

L’héritage des militants antifranquistes

Selon la notification du ministère de l’intérieur, si M. Hébert « parvenait à rejoindre à nouveau les rangs des combattants des Unités de protection du peuple YPG, son retour sur le territoire national constituerait une menace particulièrement grave pour l’ordre public, l’expérience opérationnelle acquise sur place étant susceptible d’être utilisée dans le cadre d’actions violentes de l’ultragauche révolutionnaire perpétrées contre les intérêts français ». En mars 2017, le tribunal administratif de Paris annulait l’arrêté du ministère de l’intérieur. « Le tribunal a battu en brèche le récit construit par la DGSI au motif que rien ne prouvait que les activités des YPG revêtaient un caractère terroriste, explique l’avocat de M. Hébert, Me Raphaël Kempf. Les magistrats ont aussi reconnu qu’il ne représentait pas un risque pour la sécurité publique lors de son retour en France. »

Mais la DGSI n’a pas lâché les militants engagés au Rojava et distille toujours des récits alarmistes, repris par une partie de la presse (4). En janvier 2021, M. Laurent Nuñez, coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, évoquait des militants revenus « aguerris » du nord de la Syrie et les associait à une nébuleuse de l’« ultragauche » ayant commis des dizaines d’actions violentes de « basse intensité » — dont une majorité contre des pylônes de téléphonie.

Ces militants tisseraient selon lui des liens « avec des mouvements panafricanistes, dénonçant les violences policières, environnementalistes ou contre l’islamophobie d’État » dont le but serait de « renverser les institutions républicaines » (5). Le Collectif des combattantes et combattants francophones du Rojava (CCFR) lui a répondu en affirmant contester le système politique en vigueur en France par des moyens autres que l’action violente : « En rentrant chez nous, nous ne nous attendions pas à recevoir la Légion d’honneur, ni même à être remerciés par qui que ce soit, mais nous ne pouvions pas imaginer que nous serions désignés comme des ennemis de l’intérieur et traités à l’égal des djihadistes que nous avions combattus (6). »

M. Hébert inscrit son engagement dans la lignée des militants internationalistes révolutionnaires enrôlés aux côtés des républicains espagnols en 1936. L’ouvrage collectif auquel il a participé (7) fait référence à Hommage à la Catalogne, le livre dans lequel George Orwell relate son combat aux côtés des miliciens du Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM, antistalinien) durant la guerre d’Espagne. Pour les auteurs d’Hommage au Rojava, il est aussi important de relater le combat contre l’OEI que de témoigner de l’expérience « communaliste » en cours, fondée sur le socialisme, la laïcité, l’égalité entre hommes et femmes ainsi qu’entre groupes ethniques et religieux. « C’est pour soutenir cette révolution que nous sommes partis, explique M. Hébert. Nous étions des gens ordinaires et, à un moment de notre vie, nous avons tout quitté, lucidement et sans fanatisme, pour combattre aux côtés des populations du Kurdistan syrien. Mais, depuis 2016, la DGSI décide qui est un bon volontaire des YPG et qui est un mauvais volontaire. Ceux qui n’étaient pas politisés n’ont pas été inquiétés, mais ceux qui ont un profil militant sont surveillés et fichés. Les services de police nous utilisent comme des épouvantails dans un contexte politique tendu. »

Sous les bombardements turcs

Fin 2016, juste après avoir obtenu une licence à l’université, le militant qui se fait appeler Siyah est parti au Rojava pour un an et demi. Il y est retourné une seconde fois en février 2019, pour huit mois. Il a participé à de nombreux combats contre l’OEI, mais aussi contre l’armée turque et ses milices islamistes, lors de l’invasion d’une partie du Rojava en mars 2018, puis en octobre 2019, aux côtés

des FDS, abandonnées à l’époque par M. Donald Trump et par les Occidentaux. Durant les intenses bombardements de l’aviation turque à Afrin et à Ras Al-Aïn, Siyah a perdu des dizaines de ses compagnons kurdes, arabes ou internationalistes. Dès son premier retour en France, il a été interpellé par la DGSI : « Ils m’ont interrogé durant plusieurs heures sur mon engagement au Rojava, mais aussi sur tout mon passé de militant en France et en Europe, raconte-t-il. Devant ma mauvaise volonté, ils m’ont fait comprendre que j’avais plutôt intérêt à coopérer avec eux. Mais leur cadre d’intervention n’était pas légal, car le fait d’être allé en Syrie combattre aux côtés des forces kurdes n’est pas encore un crime… Désormais, je suis “fiché S” et cela me pose beaucoup de problèmes dans les aéroports quand je me déplace en Europe. Les policiers me prennent pour un islamiste. »

Siyah souligne l’incohérence de l’État français, qui tente de criminaliser les volontaires internationalistes alors qu’il a lui-même envoyé ses forces spéciales appuyer les forces kurdes. « La DGSI sait très bien que les YPG ne sont pas un mouvement terroriste. L’État français est dans une espèce de névrose. Ses policiers tentent à tout prix de relier notre engagement là-bas à notre engagement ici. Ils cherchent depuis longtemps à criminaliser les mouvements révolutionnaires en France. Ils sont obsédés par les révoltes populaires, les “gilets jaunes”, les zadistes, les black blocs, et fantasment sur l’ultragauche et ses cellules clandestines. »

Les services de l’État utilisent les dispositifs du code pénal initialement prévus pour lutter contre le terrorisme à des fins de contrôle de mouvements politiques ou sociaux. « Cela peut paraître choquant que le ministère de l’intérieur empêche André Hébert, militant de gauche, de partir combattre Daech en utilisant une décision administrative permise par la loi antiterroriste de 2014, commente Me Kempf. Mais le problème vient de ces lois qui valident la possibilité de prendre des mesures de contrainte à l’égard de certains de nos concitoyens sur la base de simples soupçons. Ceux-ci proviennent des services de renseignement et ne sont étayés que par des “notes blanches”, des documents souvent sans date ni titre qui font état de ce que les services de renseignement prétendent avoir recueilli. »

Dans son livre Ennemis d’État (8), Me Kempf fait remonter l’origine de l’accumulation contemporaine de lois liberticides aux « lois scélérates » adoptées à la fin du XIXe siècle pour réprimer les anarchistes, et dont l’usage a très vite été étendu. Selon l’avocat, les lois d’exception votées pour lutter contre le terrorisme islamiste sont désormais utilisées contre des musulmans présumés « trop » croyants, des écologistes « trop » radicaux, des manifestants « trop » virulents, voire les opposants politiques. Les militants engagés au Rojava s’ajoutent désormais à la liste.

L’incrimination d’« association de malfaiteurs » fut introduite dans la deuxième des trois « lois scélérates » adoptées en 1893 et 1894. Elle a été complétée par la mention « terroriste » dans la loi du 22 juillet 1996, qui étendait son application, avant que les peines soient aggravées par d’autres lois en 2004 et 2016.

Un précédent, l’affaire de Tarnac

La juge d’instruction Sarah Massoud, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature, rappelle l’opposition ancienne de son organisation à cette incrimination : « Pour nous, ce sont des infractions d’intention qui sont rédigées de manière assez floue dans leur élément matériel ou leur élément intentionnel. On n’est plus du tout dans la recherche d’un passage à l’acte et on ne va pas chercher au-delà des éléments intentionnels à avoir des intentions franches. Cette définition d’une incrimination est dangereuse, car elle crée un droit pénal très plastique dont les contours sont extrêmement souples (9). »

Par deux fois, l’« association de malfaiteurs terroriste » a déjà été utilisée contre des militants libertaires ou anticapitalistes. La première affaire concernait en 2007 des militants poursuivis pour le dépôt sous une dépanneuse de la police d’un objet incendiaire qui n’avait pas explosé. Ils furent condamnés à des peines de six mois à un an de prison ferme. La seconde affaire, dite « de Tarnac », a conduit à l’inculpation en 2008 de huit militants soupçonnés d’appartenir à une cellule « invisible » « ayant pour objet la lutte armée » et d’avoir saboté des caténaires de TGV. Après dix ans d’errance policière, le tribunal correctionnel de Paris a prononcé le 12 avril 2018 la relaxe de tous les accusés.

Ce fiasco judiciaire illustre les dérives de l’antiterrorisme lorsqu’il est instrumentalisé à des fins politiques. Mais l’incrimination demeure, et elle vient d’être utilisée contre les sept personnes arrêtées à la mi-décembre.

Philippe Baqué

Journaliste.

Notes

(1) Lire Mireille Court et Chris Den Hond, « Une utopie au coeur du chaos syrien », Le Monde diplomatique, septembre 2017.

(2) André Hébert, Jusqu’à Rakka. Avec les Kurdes contre Daech, Les Belles Lettres, coll. « Mémoires de guerre », Paris, 2019.

(3) Loi no 2014-1353 du 13 novembre 2014.

(4) Matthieu Suc et Jacques Massey, « Ces revenants du Rojava qui inquiètent les services de renseignement », Mediapart, 1er septembre 2019.

(5) Jean Chichizola et Christophe Cornevin, « Laurent Nuñez : “Avec 170 sabotages perpétrés depuis mars 2020, l’ultragauche monte en puissance” », Le Figaro, Paris, 13 janvier 2021.

(6) « Opération antiterroriste du 8 décembre. Tribune du Collectif des combattantes et combattants francophones du Rojava en soutien à leur camarade incarcéré », Lundi matin, 2 février 2021.

(7) Collectif, Hommage au Rojava. Les combattants internationalistes témoignent, Libertalia, Montreuil, 2020.

(8) Raphaël Kempf, Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, La Fabrique, Paris, 2019. Lire Raphaël Kempf, « Le retour des lois scélérates », Le Monde diplomatique, janvier 2020.

(9) Laurence Blisson, « Risques et périls de l’association de malfaiteurs

Antiterrorisme & Ultragauche: la gouvernance par la peur

Le 8 decembre 2020, plusieurs perquisitions en France ont mené à l’incarcération de 5 personnes pour association de malfaiteur à caractère terroriste. Il ne leur est rien reproché de précis, la terminologie même de l’accusation est floue, et pire que tout iels sont enfermé.es sur la base “de soupçons” de “vague projet d’action violente” visant à “déstabiliser les institutions et la démocratie”… Un fusil de chasse, des produits ménagers, et une maigre enquête de la DGSI suffisent pour inculper plusieurs personnes, et permettent au gouvernement et ses institutions de communiquer à propos d’une menace “d’ultragauche” dont on nous protègerait.

« Ultragauche », c’est le terme le plus effrayant utilisé dans le discours gouvernemental pour marginaliser les luttes de gauche dites autonomes, c’est-à-dire critiquant, refusant et échappant aux controle étatique afin de garantir leur indépendance. Historiquement les luttes autonomes ont bien un lien avec ce terme qui désigne un courant de démocratie directe du début du siècle, une pratique importante à l’autonomie des luttes sociales, mais le gouvernement l’utilise de manière à escamoter cette réfèrence et conserver la charge symbolique “extrémiste” liée au mot “Ultra”.

Cette communication annonce aussi la couleur avec la qualification “terroriste”. “Gouvernement par la terreur”, ou “utilisation de la violence pour parvenir à des fins politiques”, voilà la définition du “terrorisme” lorsqu’on interroge un moteur de recherche. Alors même qu’elle s’applique parfaitement à nos gouvernants, son utilisation permet l’amalgame entre des personnes aussi différentes que des écologistes pacifistes ou des musulmans et des réactionnaires meurtriers, tout en incitant à la peur qui précède toute forme de réflexion.

Pour rendre tangible la “menace” de la démocratie directe et de ses partisan.e.s aux yeux de l’opinion publique, les institutions n’ont rien trouvé de mieux qu’un jeune homme ayant combattu l’état islamique auprès des kurdes du rojava, un territoire se définissant comme un système démocratique fédéral laïque, antisexiste, et écologiste… La menace terroriste d’ultra gauche se résume ainsi à quelques liens entre des personnes, des soupçons , une expérience de combat antifasciste, et l’utilisation de moyens de communication préservant l’anonymat. Au même moment, un coup de filet à l’extrême-droite met à jour l’achat et la vente d’armes par d’ex-militaires appelant au putsh, qui récoltent une bien simple et complaisante accusation “d’association de malfaiteurs” sans aucune qualification terroriste, malgré la possession de plus de 200 armes et de tonnes de munitions…

Ce qui mène a se demander : Qui terrorise qui ? Car si le label “terroriste” associe directement ; défenseur.euse.s de la démocratie directe, de la solidarité, de la liberté et de l’équité ; aux tueurs réactionnaires de Daesh, tout en écartant des fascistes qui projettent pourtant d’attenter à l’aspect démocratique des institutions et à la vie d’autrui, c’est bien que son sens n’est pas de désigner une menace spécifique. Au contraire c’est un fourre-tout articulé autour de la notion “d’ennemi intérieur” dont ne font manifestement pas partie les composantes les plus directement nocives et menaçantes notamment par leur racisme, leur islamophobie, leur sexisme haineux.

Nous sommes donc surtout menacé.e.s par tout un tas de réactionnaires, d’orthodoxes, et de gestionnaires voulant décider à notre place et imposer des modes de vie contraignants, dont l’état et les gouvernements qui le représentent font partie. Car l’arrestation des inculpé.e.s du 8 décembre vient occuper l’espace médiatique de manière opportune, en accompagnant à la fois les propositions de lois sur le “séparatisme” et la “securité globale”, tout en attaquant les constestataires et la critique sociale que cet arsenal législatif a mobilisés. Cet agenda n’a rien d’hasardeux et il est évident que cette affaire sert de communication politico-policière afin de criminaliser et diviser les mouvements d’émancipation qui cherchent à garantir nos droits et libertés. Une vaine tentative d’associer les pratiques et revendications les plus émancipatrices à des actes de guerre sordides, quand ils en sont eux-mêmes coupables (comme lorsque l’armée française bombarde un mariage au Mali).

Quand l’État parle de menace terroriste, la menace terroriste c’est l’État !

Effrayer les administré.e.s, criminaliser les luttes sociales, et réprimer des individus sans autre prétexte que “des soupçons”, voilà le monde dans lequel vous vivez, régi à coup de matraque et de propagande médiatique.

Plus que jamais il est nécessaire de lutter contre les restrictions de nos libertés, le fichage de nos vies, la répression des mouvements sociaux, et pour un monde de solidarité et de partage débarassé de toutes oppressions !

Dans la rue, sur les réseaux, au travail, en famille, avec les ami.e.s, partout où c’est possible et c’est possible partout, luttez, protestez, organisez-vous, ne cédez pas à la peur!

Liberté pour les inculpé.e.s du 08/12!

Rassemblement contre la Loi « sécurité globale » – 16 janvier

Bonjour,
Moi je viens vous parler d’anti-terrorisme. Ou plutôt, je viens poser cette question : (avec l’antiterrorisme), qui terrorise qui ? Le 8 décembre dernier, 9 personnes ont été la cible d’une opération politico-policière. L’une d’entre elles est l’amie de beaucoup de gens ici. Je parle au nom du comité rennais de soutien aux inculpé.es du 8 décembre.
A l’heure actuelle, parmi les 9 personnes arrêtées, 2 ont été libérées sans suite, 2 sont sous controle judiciaire (pointer tous les jours au comissariat), et 5 en détention provisoire.
Voilà, alors déjà, ce qu’il faut bien comprendre, c’est que 5 personnes sont en prison pour présemption d’intention ! Yels sont donc éparpillé-es dans differentes prisons en région parisienne, mais pas n’importe comment : ce sont des DPS « détenu.es particulièrement surveillées », comme si elles menaçaient de faire fondre les institutions étatiques avec un regard bien placé. Ça serait presque drôle, si ça n’était pas si déshumanisant et violent. La perquisition était violente : 6h du matin, tout le monde menotté, plein de trucs cassés dans les maisons, molosses du RAID et de la DGSI… La garde à vue, à Levallois perret, était violente : pendant 4 jours sous des néons non stop, sans plus aucune notion du temps, pour mettre bien à l’aise lors des interrogatoires de 6h par jour à base de « Qu’est-ce que vous pensez de la République ? ». Ces méthodes sont dignes de la « torture blanche ». Donc soit dit en passant, on peut considérer que tout ce qui sortira de ces 96h est nul et non avenu, car ce sont des aveux sous la torture.
Le premier mois de détention était violent : placée à l’isolement, pas le droit de faire des vraies promenades, réveillée toutes les 2h la nuit, blocage des lettres que ses proches lui envoient… Enfin, le début de la médiatisation était violente : des informations ont été divulgués sur leur vie privée comme leurs lieux d’habitation, leurs descriptions physique et leurs modes de vie, et aussi des informations de leur entourage, ce qui les met en danger ! L’entourage d’ailleurs est placé sous haute surveillance car le dossier est toujours en instruction. Et il y a eu d’autres perquisitions depuis. Tout cet arsenal déployé pour piétiner des personnes, c’est tout cela qui terrorise. On espère que le traumatisme de nos ami.es ne sera pas trop profond, et on leur envoi tout l’amour et le courage qu’on peut.
Ces 7 personnes sont accusées « d’association de malfaiteur en vue d’actes terroristes criminels » : cela veut dire qu’aucun fait répréhensible par la loi ne leur ai reproché. Elles sont simplement suspectées d’avoir l’intention de nuire à la police, ou à l’armée peut-être… Mais sur le projet lui-même, c’est plutôt très flou, voire creux. En fait il n’y a pas de projet. Les renseignements préfèrent laisser libre cours à l’imagination du public : « ultragauche », « bombes artisanales », « armes », « retour de zone de guerre »… Les journalistes adorent, et reprennent sans broncher, voire pour ceux de droite font un peu de zèle : la peur, c’est leur crédo. On apprend dans le Point que ce sont certainement des grandes menaces pour la Nation puisque l’un des inculpé.es est artificier à Disneyland et s’occupait de la parade de la Reine des Neiges.
On parle aussi d’une association de Air Soft (c’est du paint ball) et de produits ménagers pouvant servir à la fabrication d’explosifs, comme de l’acétone. Alors, terrifié.es ?!? Ils aimeraient nous faire croire à une milice qui se monte pour attaquer la police. Ils ont fait ce qu’ils ont pu, mais bien franchement, je ne pense pas qu’un Etat et ses institutions puisse être terrorisé par tout ça… D’ailleurs, en décembre dernier une personne a tué 3 gendarmes dans le Puy-de-Dome, en leur tirant dessus. Les médias l’ont sobrement appelé un forcené. Mais des personnes qui n’ont commis aucun acte violent, elles, peuvent être appelées des terroristes ! Ce qui prouve que cette qualification n’a rien à voir avec la gravité des actes, mais avec les convictions politiques qui sont associées aux personnes. Et surtout, avec ce qui sert les intérêts du moment.
Car, ce qui leur vaut un tel traitement par les services antiterroristes, c’est qu’ils et elles auraient tenu des propos critiques à l’égard de la police. Voire auraient exprimé une colère à l’encontre de cette institution. Ça faisait 9 mois que les renseignements généraux les écoutaient pour guetter ces paroles, et ils ont dû être vraiment vexé.es de ce qu’ils ont entendu. Ecoutez la réaction d’Eric Ciotti, un député républicain :
« Des terroristes d’extrême gauche voulaient s’en prendre à des policiers ! Ils s’attaquent à l’uniforme de la République qui est le dernier obstacle à leur dictature et leur soif de chaos » C’est bien tenté Eric, mais je ne crois pas que beaucoup de gens voient en ce moment la police comme un bouclier qui nous protège de quoi que ce soit, et certainement pas d’une dictature… C’est pour le moins audacieux et surtout très utile de dire ça dans ce contexte où « Tout le monde déteste la police ».
Dans ce contexte où les violences policières ont été bien visibilisées par les mouvements écolos, puis par le mouvement des Gilets Jaunes, puis par le mouvement international Black Lives Matter, et bien sûr par toutes les familles qui réclament depuis des années justice et vérité pour leurs proches tués par la police. Vous connaissez peut-être Awa Gueye dont le frère Babacar a été tué en 2015 par la BAC à Rennes, ou Assa Traore qui réclame justice pour son frère Adama assassiné en région parisienne… La liste est longue, trop longue, et à chaque fois, la justice couvre les mensonges de la police. Ces mouvements sociaux successifs et ces luttes de fond ont permis de dénoncer un système répressif en roue libre, hors contrôle, et très raciste. Et si on ajoute à ça le contexte actuel de la lutte contre les lois de sécurité globale, qui choquent vraiment beaucoup de monde, justement parce que ça a à voir avec une dictature…
En tout cas, ces arrestations participent à la sensation d’insécurité et à la confusion qui règne en ce moment et elles portent ce message : « Si vous critiquez la police, on peut vous mettre en taule, sans procès ! »
Tout ça vous rappelle sans doute l’affaire Tarnac, qui a démarré en 2008. C’est vrai que les ingrédients sont similaires : une situation politique tendue, un mouvement social profond, une volonté gouvernementale de le criminaliser, 9 militant.es de gauche attrapé.es pour la création d’un ennemi intérieur qui justifierait des lois sécuritaires : c’est vraiment des affaires qui tombent à pic !! Dans les 2 dossiers, il manque « juste » des actes illégaux. Les inculpé.es de Tarnac ont été innocenté.es (beau fiasco, il faut le souligner). L’affaire tout juste clôturée, la voie est libre pour faire à nouveau planer la menace de la condamnation de militant.es pour terrorisme ! Mais l’affaire de dite de Tarnac a duré 10 ans, et la détention provisoire qu’ont subi les inculpé.es vient d’être reconnue comme abusive. Elle l’est aussi pour les inculpé.es de cette affaire  : la détention provisoire existe juridiquement comme une mesure d’exception, il est inadmissible d’en systématiser l’usage !
Nous réclamons la mise en liberté immédiate des 5 camarades écroué.es sans raison ! Il faut d’ailleurs que cesse immédiatement l’usage systématique de la détention provisoire, des GAV, des nasses, tout cet arsenal de privation de liberté utilisé abusivement dans le seul but d’intimider.
Nous appelons à la création de comités de soutiens partout où des gens se sentent touché.es par cette affaire qui tombe à pic. Les comités de soutiens à l’affaire Tarnac peuvent se remonter et nous rejoindre, fort.es de leur victoire, ça va nous faire du bien ! On a besoin de faire du bruit par tous les moyens, on a besoin de solidarité, et on a besoin de fric pour les avocat.es. Il y a des comités qui se créent déjà à Toulouse, à Amiens, à Rouen, à Morlaix, à Rennes, à Paris, à Tarnac ! Pour tout ce que vous avez envie de faire, nous vous encourageons à les prévoir la première semaine de février, car toustes les inculpé.es passeront devant le juge d’instruction cette semaine : ça sera le moment de faire un max de bruit !!! Profitons de pas être confiné.es ! Vous pouvez nous trouver sur facebook sur la page « comité de soutien rennais aux inculpé.es de l’affaire de la Reine des Neiges »
Je voudrais terminer avec le souvenir d’une prise de parole d’Awa Gueye lors du rassemblement contre les lois sécurité globale à Rennes le 19 décembre. Awa Gueye est une femme noire qui lutte contre contre violences policières et l’impunité de la police. Malgré la pression qu’elle subit dans cette lutte et malgré le contexte politique inquiétant, elle a dit haut et fort ce 19 décembre qu’elle n’avait pas peur, qu’elle ne se laisserait pas intimider. Peu importent les déclarations comme celle de M. Cahn « je serais à la place des gamins qui militent à l’ultragauche je ferais attention à moi dans les mois à venir » : ça ne va pas suffire à nous faire peur, et surtout pas à nous faire taire. Le courage et la détermination qu’Awa Gueye diffuse, et celles de toutes les personnes qui résistent à la machine judiciaro-policière, sont plus fortes. Elle nous inspirent. nous savons qu’elles inspirent notre camarade inculpée, qu’elles traversent les murs qui l’enferment pour l’aider dans cette épreuve. Pour elle, pour toutes les personnes victimes de cette répression étatique : ne nous laissons pas intimider, ne nous laissons pas anti-terroriser, et continuons à résister !
On se retrouve début février.
Merci.

Hello,

I have come to talk to you about anti-terrorism. Or rather, I have come to ask this question: (with anti-terrorism), who is terrorising whom? On the 8th of December 2020, 9 people were the target of a political-police operation. One of them is the friend of many people here. I am speaking on behalf of the Rennes committee in support of the accused of the 8th December.

At the moment, of the 9 people arrested, 2 have been released without any further action, 2 are under judicial control (meaning they have to check in every day at the police station), and 5 are in pre-trial detention. So, already, what you have to understand is that 5 people are in prison for presumption of intention! So they are scattered in different prisons in the Paris region, but not just anyhow: they are DPS « détenus.es particulièrement surveillées » [detained under special watch], as if they were threatening to melt the state institutions with a well-placed look. It would be almost funny, if it wasn’t so dehumanising and violent. The search was violent: 6am, everyone handcuffed, lots of broken things in the houses, the RAID [French Police Unit] and the DGSI [French Security Agency]… The police custody, in Levallois perret, was violent: for 4 days under neon lights non-stop, without any notion of time, to make people feel comfortable during the interrogations of 6 hours a day based on « What do you think of the Republic? ». These methods are worthy of « white torture ». So, by the way, we can consider that everything that comes out of these 96 hours is worthless and void, because they are confessions under torture.

The first month of detention was violent: placed in solitary confinement, not allowed to go for real walks, woken up every 2 hours at night, blocking the letters that his relatives sent him… Finally, the beginning of the media coverage was violent: information was disclosed about their private life such as their places of residence, their physical descriptions and their lifestyles, and also information from their entourage, which put them in danger! Their entourage is placed under high surveillance because the case is still under investigation. And there have been other searches since then. All this arsenal deployed to trample on people, it’s all that terrorises. We hope that the trauma of our friends will not be too deep, and we send them all the love and courage we can.

These 7 people are accused of « criminal conspiracy to commit terrorist criminal acts »: this means that they have not been accused of any wrongdoing by the law. They are simply suspected of having the intention to harm the police, or the army perhaps… But on the project itself, it is rather vague, even hollow. In fact there is no draft. The intelligence services prefer to give free will to the public’s imagination: « ultra-left », « home-made bombs », « weapons », « returning from a war zone »… Journalists love it, and they resume without flinching, even for those on the right, they are a little overzealous: fear is their motto. We learn in the newspaper « Le Point » that these are certainly great threats to the Nation since one of the accused is an artificer at Disneyland and was in charge of the Snow Queen parade. There is also talk of an association of Air Soft (this is paint ball) and household products that can be used to make explosives, such as acetone. So, are you terrified yet?!? They would like us to believe that a militia is setting up to attack the police. They did what they could, but frankly, I don’t think that a state and its institutions can be terrorised by all this? Besides, last December someone killed three gendarmes in the Puy-de-Dome, shooting at them. The media soberly called him a madman. But people who haven’t committed any violent acts can be called terrorists! Which proves that this qualification has nothing to do with the seriousness of the acts, but with the political convictions associated with the people. And above all, with what serves the interests at the time.

What has led to such treatment by the anti-terrorist services is that they have allegedly made critical comments about the police. They may even have expressed anger towards the institution. They had been listening to them for 9 months and they must have been really upset about what they heard.

Listen to the reaction of Eric Ciotti, a Republican deputy :

« Extreme-left terrorists wanted to attack policemen! They are attacking the uniform of the Republic, which is the last obstacle to their dictatorship and their thirst for chaos  » It’s a good try Eric, but I don’t think many people see the police at the moment as a shield that protects us from anything, and certainly not from a dictatorship… It’s daring to say the least and above all very useful to say that in this context where « Everybody hates the police ». In this context where police violence has been well visible by the ecology movements, then by the Yellow Vests movement, then by the international Black Lives Matter movement, and of course by all the families who have been demanding for years justice and truth for their relatives killed by the police. You may know Awa Gueye whose brother Babacar was killed in 2015 by the BAC [« anti-criminality brigade] in Rennes, or Assa Traore who is demanding justice for his brother Adama murdered in the Paris region… The list is long, too long, and each time, justice covers the lies of the police. These successive social movements and fundamental struggles have made it possible to denounce a repressive system that is freewheeling, out of control, and very racist. And if we add to this the current context of the struggle against global security laws, which really shock many people, precisely because it has to do with a dictatorship… In any case, these arrests contribute to the feeling of insecurity and confusion that reigns at the moment, and they carry this message: « If you criticise the police, we can put you in jail, without trial! »

All this probably reminds you of the Tarnac affair, which started in 2008. It’s true that the ingredients are similar: a tense political situation, a deep social movement, a governmental will to criminalise it, 9 left-wing activists caught for the creation of an internal enemy that would justify security laws: these are really timely cases ! In both cases, illegal acts are « just » missing. The accused in Tarnac have been exonerated (a nice fiasco, it must be underlined). The case has just been closed, the way is now clear for the threat of the condemnation of militants for terrorism to be raised again ! But the so-called Tarnac case lasted 10 years, and the pre-trial detention of the accused has just been recognised as abusive. It is also abusive for those accused in the so-called « Snow Queen » case: pre-trial detention exists legally as an exceptional measure, and it is unacceptable to make systematic use of it! We demand the immediate release of the 5 imprisoned comrades for no reason! Moreover, the systematic use of pre-trial detention, GAVs (police custody), kettling protesters (« trap and detain »), all this arsenal of deprivation of liberty used abusively with the sole aim of intimidating must cease immediately.

We call for the creation of support committees wherever people feel affected by this case, which comes just at the right time. The support committees for the Tarnac affair can pull themselves together and join us, strengthened by their victory, it will do us good! We need to make noise by all means, we need solidarity, and we need money for the lawyers. Committees are already being created in Toulouse, Amiens, Rouen, Morlaix, Rennes, Paris and Tarnac! For everything you want to do, we encourage you to plan them for the first week of February, because all the accused.es will go before the examining magistrate this week : it will be the time to make a lot of noise !! Let’s take advantage of not being confined! You can find us on facebook on the page « Comité de soutien rennais aux inculpé.es du 8 décembre »(Rennes support committee for the accused of the 8th December case).

I would like to end with the memory of a speech by Awa Gueye at the rally against global security laws in Rennes on 19 December 2020. Awa Gueye is a black woman fighting against police violence and police impunity. Despite the pressure she is under in this struggle and despite the whole worrying political context, she said loud and clear on 19 December that she was not afraid, that she would not let herself be intimidated. It doesn’t matter statements like M. Cahn’s made : »If I was part of the kids who militate and organize within the ultra-left, I would be careful with myself in the months to come »: it’s not going to be enough to make us afraid, and especially not to silence us. The courage and determination that Awa Gueye spreads, and that of all those who resist the police machine, are stronger. They inspire us. We know that they inspire our fellow accused, that they cross beyond the walls that lock her up and help them go through these trials. For her, for all the victims of the state repression: let’s not let ourselves be intimidated, let’s not let ourselves be anti-terrorized, and let’s continue to resist!

See you at the beginning of February.

Thank you.