L’État attaqué en justice pour atteinte à la dignité humaine.

Alors que les récents évènements à Sainte-Soline et contre la réforme des retraites ont remis sur le devant médiatique l’usage de techniques contre-insurrectionnelles contre des militant.es politiques, deux inculpé.es de « l’Affaire du 8 décembre » attaquent l’État en justice suite aux conditions inhumaines de leur détention provisoire. Témoignage à l’appui.

COMMUNIQUÉ

Le 8 décembre 2020, neuf personnes désignées comme appartenant à l’ »ultragauche » étaient arrêtées par la DGSI et accusées de terrorisme. Alors que l’instruction n’a jamais permis d’établir l’existence du moindre projet d’action violente, les 7 mis.es en examen sont désormais libres sous contrôle judiciaire. Leur procès devrait se dérouler dans les prochains mois.

Le chef d’inculpation d’ »association de malfaiteurs terroristes » a été utilisé comme un véritable passe-droit par l’administration pénitentiaire pour leur imposer des conditions de détention provisoire particulièrement dégradantes et violentes.

Camille et Libre Flot ont décidé de combattre deux de ces pratiques en témoignant et en attaquant l’État en justice : les fouilles à nues systématiques pour la première, et le placement à l’isolement pour le second. Leurs recours seront bientôt examinés par le tribunal administratif. La date d’audience pour Libre Flot est fixée au 4 avril, ce mardi.

Libre Flot a passé plus de 16 mois à l’isolement, provoquant pertes de mémoire, troubles de la concentration, pertes de repères spatio-temporels, maux de tête, vertiges. Autant de conséquences d’une pratique d’un autre âge condamnées par de nombreuses instances de défense des droits humains et qui relève de la torture dite « blanche ».

Malgré ses nombreuses demandes de sortie d’isolement, faisant état des conséquences dramatiques sur sa santé, abondamment documentées, cette mesure continua d’être prolongée tous les 3 mois. Au bout d’un an, c’était au ministre de la justice lui-même d’approuver lui-même le renouvellement de cette pratiques aux dangers largement reconnus. Ce dernier n’hésita d’ailleurs pas à la renouveler alors même que Libre Flot avait entamé une grève de la faim depuis plus de 15 jours. Ce qui le poussera à prolonger sa grève pendant 3 longues semaines (36 jours au total) à la fin desquelles, au bord du coma, il sera hospitalisé. Ce n’est qu’alors que le juge d’instruction se résigna à lui accorder une libération sous bracelet électronique « pour raisons médicales ».

Camille a quant à elle subit, en toute illégalité, des fouilles à nue pendant plus de 4 mois. Ces fouilles dites « intégrales » sont particulièrement humiliantes et destructrices. Alors que celles-ci sont strictement réglementées et doivent être individuellement motivées, elles sont pourtant utilisées à tout va par l’administration pénitentiaire (voir article OIP). Le directeur de Fleury-Mérogis ira jusqu’à affirmer à Camille que ces fouilles systématiques sont « la politique de l’établissement », reconnaissant le caractère arbitraire, et illégal, du dispositif. Pour y mettre fin, elle entamera des démarches auxquelles l’établissement tentera de faire obstruction.

Comble du cynisme, le Garde des Sceaux rendait un réquisitoire le 8 mars dernier, journée internationale du droit des femmes, dans lequel il refuse de reconnaître le préjudice subi par Camille au motif qu’elle n’aurait pas consulté le service médical de la prison. Ce faisant, il met en doute la parole d’une victime d’une mesure sécuritaire s’apparentant à une agression sexuelle répétée, exercée sous la menace et en réunion. Alertée à ce sujet, Dominique Simmonot, Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté, confirmait que ce problème avait déjà été dénoncé à la Maison d’Arrêt des Femmes de Fleury-Merogis et avait fait l’objet de recommandations parlementaires.

Les fouilles à nue imposées aux femmes accusées de terrorisme, principalement musulmanes, ne sont pas des faits anodins. Elles témoignent du retour de pratiques héritées des doctrines contre-insurrectionnelles telles qu’appliquées pendant la guerre d’Algérie où le viol a été massivement utilisé comme une arme par l’armée française (voir article paru dans Le Monde). Dans ce contexte, ce n’est pas un hasard si les témoignages de jeunes femmes subissant des agressions sexuelles de la part des forces de l’ordre se multiplient ces dernières années. En témoignent récemment les plaintes déposées par quatre femmes pour « agression sexuelle » contre des policiers à Nantes lors des manifestations contre a réforme des retraites.

À l’heure où de nombreux militant.es et activistes dénoncent le déploiement de techniques contre-insurrectionnelles et militaires à leur encontre ; où le Ministre de l’Intérieur assène des mensonges largement relayés ; et où des technologies de surveillance sont déployées illégalement dans des hauts-lieux d’organisation des luttes sociales ; il semble urgent de prendre au sérieux ces formes de sévices perpétrés par des agents de l’État.

TEMOIGNAGE

Libre Flot : un an après l’isolement.

Le 8 décembre 2020, je fus l’une des 9 personnes arrêtées par la DGSI pour une soit-disant association de malfaiteurs terroristes, sans qu’aucun fait n’ait eu lieu et sans l’existence d’un projet quelconque. Ce 4 avril 2023, un an jour pour jour, après la fin de ma grève de la faim de 36 jours, dont l’issue failli être fatale, se déroule au Tribunal Administratif de Versailles une audience sur deux de mes nombreux recours (effectués tous les 3 mois ) contre ce régime de torture. Durant toute mon incarcération préventive, la « justice » refusait alors de les statuer en urgence. Ces refus clairement politiques, comme je l’ai appris, avaient comme seul intérêt de continuer les pressions sur ma personne, sans avoir à respecter leur loi.

Les Nations Unies définissent la torture comme: « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne; par un agent de la fonction publique ou avec son consentement; dans le but d’obtenir des renseignements ou des « aveux », de la punir, de l’intimider ou de faire pression sur elle ».

C’est exactement ce qui s’est passé lorsque j’ai été placé en isolement, plus encore lorsque cet isolement est imposé en détention provisoire et de manière illégale. Pourtant la circulaire du 14 avril 2011 stipule, en résumé, que l’on ne peut être placé en isolement pour les faits que l’on nous reproche (ou pour lesquels quelqu’un.e a été condamné). La raison doit être un comportement dit « inadapté » ou « dangereux ». Malgré cela, la direction de la maison d’arrêt (MA) de Bois d’Arcy m’a imposé pendant seize mois l’isolement en disant très clairement qu’elle se basait uniquement sur les faits reprochés, tout en reconnaissant que mon comportement ne posait aucun problème. J’ai aussi pu apprendre de la bouche même du directeur des détentions de la MA des Yvelines que mon placement et mon maintien à l’isolement avaient été décidés depuis le premier jour par des personnes très haut placées et que quoi je dise ou que lui-même dise ou fasse, rien n’y ferait, que cela le dépassait, que je resterai au quartier d’isolement. Donc, sans aucune gène, on bafoue les droits d’une personne et on lui applique la torture dite « blanche ». Sans ma grève de la faim, j’y serais peut-être encore aujourd’hui.

J’ai pu constater la violence de ce procédé et ressentir le désir d’annihilation comme sa finalité. Ce ne fut que lorsque j’ai senti le néant m’absorber que, comme un dernier sursaut de vie, j’ai mis celle-ci dans la balance en commençant une grève de la faim pour m’en sortir. La situation était telle que je n’avais plus rien à perdre, ma vie s’effilochait déjà.

Je ne pourrai pas mieux définir la réalité inhumaine de l’isolement que je ne l’ai fait auparavant dans mes lettres, dont celles d’avril 2021, de juin 2021 et du 18 février 2022 que je vous invite à lire pour mieux saisir l’enfer de cette condition de détention.1 À l’heure actuelle, il m’est encore très douloureux de les lire tant cette expérience violemment traumatisante est incrustée en moi.
Il ne faut pas confondre l’isolement et la solitude. Non! L’isolement est à la solitude ce que la lobotomie est à la méditation. L’isolement n’est pas une torture physique existant par un fait ou un acte, mais une torture plus pernicieuse, invisible, permanente existant par cette absence continue.

Je me suis retrouvé du jour au lendemain, sans aucune relation sociale, ne pouvant sortir de ma cellule qu’accompagné par un·e gradé·e et deux surveillant.e·s, avec palpations et portail de sécurité (au minimum 5 fois par jour). À la fin de chaque parloir, sans exception, il y avait aussi une fouille à nu. Les seules « sorties » le sont dans l’espace anxiogène qu’est la promenade individuelle, boite bétonnée, où les 20m2 trouant le béton au-dessus de nos têtes sont recouverts de multiples grilles et barbelés.

Je pouvais observer les vraies promenades, je voyais les détenus exister, je considérais qu’ils étaient tellement libres. Imaginez la violence de l’isolement pour en être à considérer des gens enfermés 24H sur 24 comme étant libres. Ces derniers ne pouvaient pas me voir à cause de la quadruple dose de barreaux et de caillebotis de ma fenêtre. Je restais encore une fois non-existent.

Je pense que nous construisons notre vision de soi par ce que nous renvoient les autres. Mais alors, comment exister quand il n’y a pas d’autres ? Quand les autres ne nous voient même pas ? L’isolement aurait-il pour but l’annihilation de soi ? Avant même d’être jugé, je devrais cesser d’exister ? Voici quelques-uns de mes questionnements de l’époque.

Des contrôles s’effectuaient toutes les deux heures environs, jour et nuit. La nuit le contrôle était accompagné inévitablement de l’allumage des lumières empêchant ainsi d’avoir un réel sommeil. Les ouvertures des verrous de portes sont bruyantes et se faire surprendre par ce son fait sursauter, donne un à-coup au cœur, une montée de stress.

En isolement de nombreux troubles sont apparus et se sont amplifiés au fil des mois: problèmes de concentration, difficultés à construire sa pensée, hébétude, perte de repères temporels, maux de tête, vertiges, pertes de mémoire, troubles visuels, pression thoracique, douleur cardiaque, douleurs articulaires, problème d’accès à son propre cerveau, peur de la disparition de ses connaissances, etc.

Mais pire que tout, c’était le cerveau qui déraillait, la pensée ne se transformant pas en parole et donc ne recevant pas de retour, n’arrivait plus à se moduler, à se matérialiser, elle devint insaisissable, comme un brouillard confus, l’impression d’être abêti, comme en état de choc, d’être paralysé de la pensée. Mon cerveau fonctionnait au ralenti, les pensées ne se renouvelaient pas et tournaient en boucles sans vraiment évoluer.

Le plus pernicieux dans l’isolement est de rendre le réel irréel. Étant donné que l’on est en permanence seul·e avec soi-même, avec ses propres pensées comme unique interaction, le monde réel ne se matérialise pas. Lors des parloirs, ces uniques moments d’interaction sociale, sont autant de plaisirs que de chamboulements, on passe, sans transition, de la stase cérébrale léthargique au « contact » humain sans temps d’adaptation! Les proches y relatent un monde qui semble imaginaire lors de moments qui, une fois terminés, semblent n’avoir été qu’un songe.

Hormis des visites médicales éclairs (souvent moins d’une minute) au quartier d’isolement, sans garantir un semblant de secret médical, avoir un rendez-vous n’est pas toujours aisé mais plus dur encore est que l’on y soit emmené. Et lorsque ça arrive, tous nos maux sont considérés « normaux au vu de ces conditions de détention ». Je n’ai jamais, malgré me demandes répétées, pu voir un psychologue. Ce qui est intéressant de voir c’est que la mise en isolement crée des troubles psychiques et physiques qui ne peuvent être suivis correctement dû au fait que l’on soit en isolement. C’est un tel non-sens qu’il est difficile de croire que ce soit un accident. En plus de tout ça, l’isolement empêche toute activité au sein de la prison, impossible de travailler, impossible de suivre des cours ou des formations.

L’administration pénitentiaire (AP) impose un rapport de force et un fonctionnement arbitraire. Le respect de nos droits n’est pas acquit, il se gagne par une lutte juridique en interne. Je me demande comment une personne non soutenue par un·e avocat·e, ne maîtrisant pas bien la langue, peut faire respecter ses droits.

[Les Séquelles]

En isolement, je n’avais pas même le loisir de ne rien faire, de me laisser aller à discuter avec d’autres humain·e·s. C’était une question de survie que d’occuper mon temps, ce temps devenu infini et antagoniste. Après ce séjour hors du monde et hors du temps, revenir dans le monde des vivants et leur rythme effréné perturbent mes fonctionnements, je n’ai plus de point de repère, plus de notion, plus d’habitude. Depuis ma sortie, quasiment un an, je ne me suis toujours pas réadapté, j’ai l’impression de nager à contre-courant, je cours mais n’accomplis rien, je m’épuise à me débattre dans une course contre la montre perdue d’avance. Je me sens tel un Don Quichotte se battant contre des moulins à temps.

J’ai bien conscience que dans nos sociétés dites modernes, beaucoup se plaignent de ne pas avoir le temps de faire tout ce qu’iels veulent. Concernant ma sortie d’isolement, je suis passé d’un antipode -où ce temps, par son immobilisme, est une torture- à son extrême opposé. Ce bouleversement d’une telle amplitude m’impacte sans commune mesure alors que je retrouve un semblant de vie réelle.

Les problèmes de mémoire qui surgirent et s’amplifièrent durant cette période d’isolement n’ont pas disparu à la sortie. Les informations continuèrent à sortir aussi vite de ma tête qu’elle en étaient rentrées. Combien de fois n’ai-je pas posé la même question trois ou quatre fois dans la même conversation ? Bien qu’aujourd’hui, il m’arrive parfois de me surprendre et de me réjouir à me souvenir de quelques choses ne m’ayant pas faussé compagnie, je suis encore loin d’avoir retrouvé mes facultés mémorielles. Les retrouverai-je un jour ?

Une des séquelles, des plus dommageables, ce sont les rapports aux autres. Moi qui aime à me définir comme un individu social, je me retrouve à peiner à interagir avec mes semblables. Je suis désormais incapable de me retrouver avec un nombre important d’ami·e·s. Au delà de cinq ou six personnes, je me sens submergé, pris dans un tourbillon de paroles, d’expressions faciales, de langages corporaux, trop nombreux pour être décryptés en même temps. Je me retrouve mal à l’aise et j’ai tendance à m’effacer. Mais même avec un nombre plus réduit, d’autres difficultés font surface. Je peine à différencier ce qui est de l’ordre de la pensée privée et ce qui est de l’ordre de la discussion, du partage. Souvent, je tourne et retourne mes pensées dans ma tête, inapte à les exprimer et incapable de lancer un sujet de conversation. Je suis devenu un piètre interlocuteur.

Alors, dans cette situation, comment rencontrer de nouvelles personnes ? Comment se faire de nouveaux·elles ami·e·s quand les siens sont hors du seul département où je suis assigné ? Me reste bien l’humour dont je suis si friand (à défaut d’être drôle), mais hélas, une épine pointe ici aussi… Comment se permettre de faire des blagues librement lorsqu’on sait que plusieurs de celles-ci, décontextualisées, sont à charge dans notre dossier ? Quand on s’inquiète des conséquences graves que peuvent avoir une plaisanterie anodine, comment conserver une amusante insouciance? Soucieux, je le suis en permanence, sans répit aucun. Quelles relations sociales est-on capable de construire lorsque l’on a que ces propres problèmes en tête, à la bouche ?

Seize mois sans contact humain, avec pour unique contact physique, les palpations des surveillants, cela chamboule considérablement le rapport à l’affect. Une relation ambivalente se créé. Comme un besoin insatiable d’affection qui peut devenir étouffant pour les autres et, à la fois, ne plus vraiment concevoir les contacts physiques comme communication. Se sentir, si ce n’est agressé, tout du moins inconfortable lorsqu’un·e ami·e pose gentiment une main sur son bras, quand un·e ami·e pose deux secondes sa tête sur son épaule. En vouloir trop ou trop peu, ou les deux, encore une fois, c’est un équilibre qui est rompu.

Lorsqu’on nous force violemment à quitter le monde, en nous plaçant en isolement, on se retrouve comme étranger à celui-ci. En sortir ne veut pas dire revenir à la normale. Non, il y a les autres, les vivants et cet être profondément traumatisé qui doit, mais ne sait comment, panser ses plaies. Ne plus savoir ni quoi dire, ni comment le dire, ni se comporter, ni où être, constituent une continuité de l’enfermement même à l’extérieur. La sensation d’être enfermé dans sa tête, dans sa carcasse. Un besoin d’exulter qui n’arrive hélas jamais. Bien sûr cela n’a rien de comparable avec la souffrance subit en isolement, dans les caveaux de la république.

J’ai beau suivre une psychothérapie, je n’en vois pas le bénéfice. Cela me renvoie juste, par la reformulation, en ôtant les dénis et euphémismes utilisés comme mécanisme de défense, l’odieuse torture subie et le v(i)ol de mon être. Espérons que les prochaines phases portent un tant soit peu leurs fruits.

Ce 4 avril 2023, l’État français, par le biais de sa « justice », devra répondre de cet acte de torture illégale, réprimé par sa propre loi. Je n’ai pas d’inquiétude vis à vis du rendu. La fRance est bien connue par les instances européennes des droits humains pour son non-respect en cette matière. Elle a l’habitude de payer, comme si elle se lavait les mains et de continuer ses pratiques inacceptables et ce, soit disant « au nom du peuple français ». J’espère que cette audience sera, à sa modeste échelle, comme une pierre ôtée à l’édifice de la violence carcérale.

30 mars 2023
Libre Flot

Pour télécharger et diffuser le témoignage :

BINGO! Quel terroriste d’ultragauche es-tu ?

50 questions que la DGSI pose en garde-à-vue antiterroriste.

Il y a deux ans, le Ministère de l’Intérieur orchestrait l’opération antiterroriste du 8 décembre 2020, en pleine mobilisation contre deux lois extrêmement liberticides : sécurité globale et séparatisme. Le gouvernement se vantait alors d’avoir « neutralisé » des « activistes violents d’ultragauche » qui auraient eu pour projet de « s’en prendre aux forces de l’ordre ».

Ces camarades virent la DGSI et ses petits soldats du GAO et du RAID les arracher à leur sommeil. Viseurs laser pointés sur elleux, menottes, sac sur la tête, iels étaient embarqué.es dans des fourgons banalisés en direction des sous-sols de la police antiterroriste parisienne afin d’y être séquestré.es pendant plus de trois jours d’interrogatoires. Cinq d’entre elleux furent incarcéré.es pendant de longs mois, avec tout le panel des mesures « antiterroristes » appliquées en prison.

Voilà donc deux ans que le spectre du « terrorisme » politique de gauche a donc refait son apparition dans le spectacle sécuritaire.

Suite au meurtre ciblé de trois camarades kurdes à Paris ce 23 décembre 2022, c’est avec écœurement que nous avons entendu Ducont-Moretti affirmer sans honte que « le racisme n’est pas une idéologie » et que l’auteur de ces crimes ne pouvait donc pas être poursuivi pour « terrorisme ».

Le gouvernement rappelle encore une fois ô combien l’antiterrorisme est un outil de répression des idéologies subversives (qu’elle soient fascistes ou révolutionnaires), et ô combien le racisme est compatible avec l’ordre républicain.

L’adhésion présumée à certaines idées de nos camarades du 8/12 tient une place centrale dans l’accusation qui leur est faite. De la DGSI au PNAT, la criminalisation de leurs engagements politiques est l’axe principal permettant d’alimenter une présomption de culpabilité qui semble se suffire à elle-même. Ce degré extrême de répression des idées révolutionnaires a pour objectif de purger la société de ses éléments contestataires afin d’imposer un régime néo-fasciste. Des pans de plus en plus larges du mouvement social sont visés par les dispositifs antiterroristes : black blocs, écologistes, anarchistes, grévistes, (pro)kurdes, journalistes d’investigation, etc.

Voilà pourquoi il nous a semblé important de vous partager ces 50 questions qui ont été posées par la DGSI aux inculpé.es lors des gardes-à-vue à Levallois-Perret entre le 8 et le 12 décembre 2020.

True Story.
#FuckDGSI

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ALORS, QUEL TERRORISTE D’ULTRAGAUCHE ES-TU ?
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« De fait, l’ultragauche est multiple et protéïforme »
Parquet National Anti-Terroriste

L’« ultragauche » est une construction policière qui a pour intérêt d’englober pêle-mêle la multitude des luttes sociales qui échappent au contrôle électoral, associatif et syndical. Le PNAT considère que la menace d’ultragauche se dissimule dans un vaste panel de lieux et de pratiques. Pratique !

Dans ses réquisitions de novembre 2022, le PNAT associe à une « menace terroriste » :

☠ « un certain nombre de maisons d’édition » (La Fabrique, Agone, Entremonde, Libertalia, etc.)

☠ « une myriade de sites internet » (Lundi Matin, Attaque, Chronique de la guerre sociale en France, La Horde, Paris Luttes Info, La Bogue, IAATA, ect.)

☠ « un militantisme non-violent » (tractage, organisation de concerts, collage, graffiti, piquets de grève, soutien logistique à des grèvistes et des ressortissants étrangers, etc.)

«certains espaces de rencontres » (bars associatifs, clubs de sport, centres sociaux, collectifs d’habitants, librairies, squats, etc.)

« certains espaces ruraux désertés » (Cévennes, Corrèze, Ariège, Tarn, Ardèche, Dordogne, etc.)

« les dégradations de biens privés ou publics » (champs OGM, caméras de surveillance, antennes relais, armoires de fibre optique, banques, multinationales, véhicules de gendarmerie, etc.)

« l’occupation illégale de lieux » (squats, occupations, ZADs, etc.)

« des actions coup de poing » (attaques de permanences de partis, affrontements avec des militants d’extrême-droite, black bloc, actions de solidarité internationale, etc.)

Il peut y avoir plusieurs manières de réagir face à une GAV antiterroriste. La plus recommandée est d’exercer son droit à garde le silence. Cependant, vu la « gravité » des soupçons qui pèsent sur toi, ta non-collaboration sera considérée comme un aveu de culpabilité, ou une « preuve » que tu es un.e militant.e aguerri.e. Tu iras probablement en détention provisoire, mais ta défense sera plus « facile ».

Une fois le dossier entre tes mains, tu sauras à quoi t’en tenir.

Les conditions d’une GAV antiterroriste sont particulières : privation sensorielle et temporelle, interrogatoires très intensifs (entre 300 et 800 questions), instabilité émotionnelle due à l’arrestation spectaculaire, menace d’une peine de prison démesurée, techniques de manipulation des enquêteur.ices, etc.

Il n’y a pas de honte à craquer, pleurer, répondre aux questions, etc. Ce sont des professionnels qui ont accumulé des décennies d’expériences pour « faire parler » leurs suspects. Mais il ne faut jamais oublier : chaque question (même anodine) a pour objectif que tu t’incrimines toi-même ou que tu incrimines d’autres personnes. Les agents te mentiront aisément.

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POUR S’ARMER FACE À LA GARDE A VUE
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« Comment la police interroge et comment s’en défendre » du Projet Évasions
Disponible en téléchargement sur le site: https://projet-evasions.org/

« Petit manuel de défense collective: de la rue au tribunal » de Riposte Collective
Disponible sur le site: https://infokiosques.net/

[Flashmob] Patriarcat au feu! 🔥 ️

Un grand merci aux camarades de Nous Toutes 35 qui nous ont dédié leur flashmob du 8 décembre dernier! ❤️‍🔥

Voici leur message de soutien:

« A l’occasion de ce flashmob du 8 décembre, nous souhaitions adresser une pensée particulière aux inculpé.es du 8 décembre.

9 activistes arrêté.es en 2020 par la DGSI, accusé.es alors de préparer une action violente.

La justice anti terroriste est utilisée pour réprimer les mouvements progressistes d’une ‘ultragauche’ fantasmée.

A Nous Toutes 35, en tant que collectif féministe, anticapitaliste et intersectionnel, nous refusons la diabolisation et la criminalisation de nos mouvements.

Nous ne céderons sur rien, ni sur la légitimité de nos existences, ni sur nos horizons politiques, ni sur notre droit à vivre ici et maintenant des vies libres qui font sens pour nous. »

C’était il y a deux ans : l’opération antiterroriste du 8 décembre.

On s’en souvient comme si c’était hier. Neuf camarades aux idéaux anarchistes et communistes se faisaient violemment arrêter par des polices militaires (GAO, GIGN) sous ordres de la DGSI. Un squat fréquenté par des centaines de personnes pris d’assaut, l’intimité des familles violée dans des perquisitions qui durèrent des heures, les camarades inculpé.es embarqués avec un sac sur la tête, des flics sur-armés, viseurs laser et doigts sur la gâchette, la terreur policière.

Après presque 4 jours de GAV à Levallois-Perret, 7 étaient mis.es en examen pour « association de malfaiteurs terroristes », les discours policiers fuitaient dans les médias proches du Parquet National Anti-Terroriste (PNAT) : Le Point, Valeurs Actuelles, Le Figaro.

Sous le choc, des proches et des camarades se sont spontanément montés en groupes de soutien, à Toulouse, en région francilienne, à Amiens, à Rennes… Nos potes des terroristes ? C’est quoi ce délire ?

RELIRE : Lettre d’Ami.es depuis Toulouse https://iaata.info/Lettre-d-ami-es-depuis-Toulouse-4585.html

Cinq d’entre elleux étaient envoyés en prison, sous statut DPS (Détenus Particulièrement Signalés). Traité en dangereux sanguinaire, un était mi en Quartier d’Isolement, la prison dans la prison. Libre Flot, après avoir pourtant combattu Daesh et protégé les français.es du terrorisme en participant à la libération de Raqqa, était traité comme « ses petits amis de Daesh » comme le dira Jean-Marc Herbaut, juge d’instruction à charge de l’affaire.

Les « faits » reprochés ? Avoir essayé de fabriquer une petite quantité d’explosif en regardant un tuto sur internet et avoir fait quelques fois de l’Airsoft pendant le confinement. Détenir pour certains de vieilles armes, légalement, et pour un autre, un fusil à canon scié trouvé en vide grenier.

REVOIR : 30 JANVIER : Prise de Parole – Rassemblement contre les lois liberticides https://www.youtube.com/watch?v=XtsKyJmpCSQ

A ces faits, qui devraient relever du droit commun, s’ajoute donc la dimension intentionnelle. Et c’est là qu’entre en jeux dans le droit français le crime d’opinion, le crime d’être révolutionnaire. Des paroles de rap, des débats enivrés, des lectures, un style de vie, deviennent les « preuves » absolues qu’il y a un « projet d’action violente ». Quelle cible ? Où ? Quand ? Comment ? On ne saura jamais, puisque la suspicion fait preuve dans un régime fasciste.

Il faut dire que le scénario est parfait pour les imaginaires policiers. Un « revenant » du Rojava leader charismatique, son ami de jeunesse un punk artificier qui est passionné par sa profession, son copain squatteur qui est parti quelques mois en Colombie, et sa compagne aux « compétences informatiques »…

RELIRE : Récit d’une mise en examen pour association de malfaiteurs terroristes. https://soutien812.blackblogs.org/2022/03/01/recit-dune-mise-en-examen-pour-association-de-malfaiteurs-terroriste/

Plusieurs dizaines de fonctionnaires, grassement payés et profondément anti-gauchistes, passent ainsi des mois à ficeler ce récit, en additionnant des éléments de la vie privée des personnes, sans tenir compte ni des contextes, ni de la chronologie, ni des projets réels mis en œuvre dans la vie réelle des personnes.

Tout ce récit est faux. Il n’y a ni groupe ni projet. Mais nous ne sommes plus dans le mensonge grossier et crapuleux comme à l’époque de Tarnac, les « services » apprennent de leurs erreurs, et l’islamophobie de la Justice fRançaise a permis de rendre bien flous les contours de « l’association de malfaiteurs » sur le dos de la communauté musulmane.

Nous avons affaire à une production minutieuse d’un récit implacable, face auquel il a été difficile de se défendre. La parole des inculpé.es a été systématiquement méprisée. L’isolement carcéral (et les souffrances psychiques qu’il cause) a permis à Jean-Marc Herbaut de mener des interrogatoires iniques, à tel point que le camarade devait demander à avoir les questions sur papier afin d’y comprendre quelque chose. Et si Libre Flot n’avait pas entamé une grève de la faim, qui durera 36 jours, il serait toujours entrain de s’observer décrépir dans ces lieux de torture que sont les Quartiers d’Isolement, sans accès à son dossier.

REVOIR : Journée Internationale de Soutien à Libre Flot (4 avril 2021) https://expansive.info/Libre-Flot-amour-et-solidarite-internationale-3230

La parole de la Défense a été balayée tandis que celle du PNAT est en roue libre. Dans ses réquisitions rendues le 23 novembre dernier, les magistrats enivrés de patriotisme se permettent même à verser dans le conspirationnisme le plus éhonté et la diffamation.

Une nouvelle entorse au « secret d’instruction » par des magistrats à conduit dernièrement à un article sur Le Figaro tellement mensonger qu’il a été modifié le jour même sous peine de poursuites. Il y était affirmé que le camarade Libre Flot était en fait… André Hébert, militant internationaliste et auteur du livre « Jusqu’à Raqqa ». Encore une dinguerie.

Aux camarades et ami.es qui nous lisent, nous savons que ces attaques ne cesseront pas et vont reprendre de plus belle à l’approche du procès, qui devrait arriver d’ici quelques mois. Soyons prêt.es et solidaires.

En ce 8 décembre 2022, nous souhaitons rappeler à touxtes que l’outil antiterroriste est une avant-garde de la militarisation de la société. Qu’il permet l’extension du non-droit par la création d’ennemis intérieurs, dans notre cas : « l’ultragauche », qui ne se résume pas à quelques « fanatiques idéologisés » mais au contraire touche une immense partie du mouvement social, de l’écologie aux luttes antiracistes et décoloniales. Accepter que sept d’entre nous soient assimilés à des meurtriers en masse c’est accepter qu’on le soit touxtes dans le futur. C’est un pas de plus dans la fascisation du régime.

Solidarité internationaliste à toutes les victimes d’État, de leurs geôles, leurs milices armées, leurs frontières. Nous savons touxtes qui terrorise qui.

Soutien812.

RÉÉCOUTER : Radio Pikez – Antiterrorisme et Désinformation https://hearthis.at/radiopikez/radio-pikez-antiterrorisme-et-desinformation-lors-du-festival-intergalactique-2021-12-03/

Pour soutenir financièrement les inculpé.es et leurs proches, il est possible de participer aux frais d’avocat.es ici : https://solidaritytodecember8.wordpress.com/

[Rennes] 4 jours d’antirep pour les 2 ans du 8/12

==== MERCREDI 7/12 : PROJECTION/DISCUSSION ====

19H // Babazula (182 Av. Général George S. Patton)

Soirée projection et discussion avec le Babazula autour du documentaire « La Rafle » (2010) qui revient sur la crise d’octobre 1970 qui a marqué l’histoire politique du Québec.

Synopsis : Après plusieurs années d’actions offensives du Front de Libération du Québec (FLQ) dirigées contre l’Etat et les banques, le FLQ procède en 1970 au kidnapping d’un haut fonctionnaire de la couronne britannique. Dans un contexte séparatiste québécois très fort et la possibilité imminente d’une insurrection populaire, l’Etat va mettre en place des mesures « d’exceptions » pour rétablir l’Ordre. Des militaires vont être déployés autour des lieux de pouvoir, et une vague d’arrestation massive et d’incarcération sera organisée.

Lien du documentaire ici : https://invidious.snopyta.org/watch?v=-BF2ySYCh0E

==== VENDREDI 9/12 : CONCERT PUNK ====

Avec les groupes : Gürs // Ectoplasme // Carrie Göss’

Infos sur le lieu par mail => comiterennes8decembre [at] riseup [point] net (clé PGP ici)

==== SAMEDI 10/12 : ATELIER SUR LA COLLABORATION CARCÉRALE EUROPEENNE : ANALYSE DU MANDAT D’ARRET EUROPEEN (MAE). ====

14H-17H // Maison Internationale de Rennes (7 quai Chateaubriand)

 Avec le Comité de Soutien à Vincenzo 

Aujourd’hui la répression des gouvernements européens à l’encontre de leur population s’étend au-delà de leurs frontières respectives. Elle est facilitée par des dispositifs administratifs et judiciaires qui laissent de moins en moins de place à la garantie des droits des individus.

Les luttes sociales n’y faisant pas exception, s’assurer une certaine connaissance de ces dispositifs est un moyen de renforcer la défense collective et la solidarité internationale dans nos luttes.

Avec cet atelier nous voulons étudier la manière dont les MAE et les récentes évolutions à la Cour de Justice Européenne expriment des priorités claires : consolider une collaboration répressive entre les gouvernements européens quitte à relayer au second plan le respect des lois dans les pays collaborateurs.

Nous y aborderons le passage du processus d’extradition au mandat d’arrêt européen, l’intégration et la justification de pratiques autoritaires et fascistes via des procédés administratifs et juridiques, des cas de personnes ayant été ciblées par un MAE.

==== DIMANCHE 11/12 : AUTO-FORMATION SUR LA PATHOLOGISATION COMME OUTIL DE RÉPRESSION ====

10H-13H // CRIDEV (41 avenue Janvier)

La diabolisation des ennemis (déviant.xes, opposant.xes, étranger.xères) a toujours été un outil de la répression au service de l’Ordre dominant. Par cet atelier on aimerait échanger avec vous sur la question de la pathologisation, que nous pensons être un outil répressif qui touche toutes les personnes confrontées aux violences d’État (policières, carcérales, judiciaires, médicales, frontalières, économiques, climatiques, etc.).

Ce moment, loin des expert.xes et des sachant.xes, sera ouvert à touxtes les personnes qui ont connu, de près ou de loin, la souffrance psychique en lien avec ces violences.

Dans un premier temps, un corpus de textes (et des podcasts) sera proposé à la lecture, puis il y aura un moment d’échange ouvert où chacun.xes pourra (si l’envie) exprimer ses compréhensions et expériences.

Nous souhaitons proposer cet espace pour étendre nos solidarités autour d’un sujet qui nous semble trop peu discuté. Nous espérons qu’il permettra d’en mieux comprendre les mécanismes et d’esquisser des manières d’y faire face.

Un infokiosque sera disponible avec des ressources utiles pour penser l’inclusivité des collectifs militant.xes, le soin aux activistes, l’auto-organisation des personnes psychiatrisées, la lutte face à la psychiatrie, etc.

==== DIMANCHE 11/12 : FORMATION : TELEPHONIE MOBILE ET ACTIVISME : PEUT-ON VRAIMENT MELANGER LES DEUX ? ====

15H-18H // Le Bocal (2 allée de Finlande)

Présentation autour des enjeux des portables (smart ou pas) dans les milieux activistes / militants / gnagnagna.

Quand les flics sont nos ennemis, nos portables peuvent-ils nous aider ? Ou nous trahiront-ils toujours ? LES DEUX MON CAPITAINE !

Deux heures et quelques pour comprendre quels sont les problèmes inévitables et comment ne pas trop se faire de mal avec ces outils de communication instantanée, lorsqu’on a besoin de s’organiser à distance sur des trucs potentiellement répréhensibles.

Deux heures et quelques pour flipper mais aussi se rassurer et apprendre à faire des choix en connaissance de cause.

Deux heures et quelques pour… nan mais en deux heures on va pas non plus changer le monde ! On va effleurer des bouts de : comment c’est crasseux la téléphonie mobile, comment Google et Apple ont un contrôle énorme, de quels outils disposent les flics, et pourquoi Signal ça vient pas nous sauver, même si parfois ça aide bien.